mercredi 9 novembre 2016

Pouvoir et malédiction de père en fils: Le goût de l'anarchie de Pier Paolo Pasolini.

"De nombreuses scènes du film mettent l'accent sur son caractère présomptueux et arrogant, à l'image de son père biologique Laïos."

 Tout à fait, comme le dit Layal, le comportement du père au pouvoir paraît avoir été légué à Oedipe avec le pouvoir lui-même. Le personnage de Laïos reprend la figure du père de Pasolini qu'il décrivait ainsi*: "tout en revendiquant volontiers de violents droits sur le présent, (son père) prévoirait une future tragédie, qui transformerait ses droits en dégradation". Pasolini en veut à son père, il considère qu'"il a fondé une famille et (qu') il l'a terrorisée". Ainsi, le personnage de Laïos reprend le caractère d'un père violent dont Pasolini aurait voulu se débarrasser (complexe d'Oedipe).

*citations provenant du portrait de son père retranscrit dans Petrofolio (édition posthume en 1992)

Pasolini confie avoir un goût pour l'anarchie. Celui-ci s'exprime dans le meurtre sauvage du père dans le film chargé de symbolique et faisant référence à l'idéologie marxiste et à la rébellion de jeunes contre l'autorité paternelle des années soixante. Même dans la technique de son film, pour créer son cinéma de poésie, il emploie un "code technique" qu'il dit être "né presque d'une intolérance aux règles, d'un besoin de liberté insolite et provocatrice, d'un goût de l'anarchie" ( L'Expérience hérétique; Langue et cinéma). Oedipe qui pourtant combat son père finit par le ressembler malgré lui. D'une part physiquement comme le dit Jocaste, ensuite par son alliance et finalement par son comportement au pouvoir. Au début, Oedipe se veut un un roi exemplaire, mais "par un désir de bien faire, il s'avère  aussi tyrannique" (Jacques Joanna: Sophocle; Paris: Fayard, 2007 (p383)). Le pouvoir semble être maudit, celui qu le détient connaît systématiquement la démesure (Labdacos viole le fils d'un autre roi).

Cependant une dimension n'est pas traitée par Layal, la valeur que prend le pouvoir quand il n'est plus possédé. Ruddy quant à lui le qualifie de « destructeur puisqu’il mène Œdipe à sa propre perte de par le parricide et l’inceste. ». Sachant que Pasolini a  un goût pour l'anarchie, il faut prendre le soin de remarquer les effets positifs qu'à l'abandon du pouvoir sur Oedipe. S'il est vrai que d'homme puissant il devient homme souillé, d'homme de pouvoir il devient homme de savoir (cela est d'autant plus apparent dans Oedipe à Colone). Pasolini montrerait-il une image négative du pouvoir détenu par un seul homme?

Nolwenn Mahé

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