mercredi 29 mars 2017

 La mise en abîme est un procédé littéraire  qui désigne l’enchâssement d'un récit dans un autre récit. Les faux monnayeurs d'André Gide écrit en 1929 est un exemple incontournable de ce procédé dans le roman. En effet, l'un des personnage principal Edouard oncle d'olivier est écrivain. Il écrit un journal personnel dans lequel il relate les différents événements de sa vie  et l'avancée de son projet d'écriture. Ce journal  porte le même nom que le roman " les faux monnayeurs".  C'est par ce biais qu'André Gide se donne la parole et développe ses propres aspirations littéraires.  Mais ce roman est beaucoup plus complexe que cela. La multitude de personnages et d'histoires qui s'entrecroisent ne serait elle pas aussi une mise en abîme de l'histoire du vécu humain ? Il est donc intéressant de s'interroger sur comment ce procédé se manifeste dans la globalité du roman Les faux monnayeurs ?

La mise en abîme la plus flagrante s'incarne dans le personnage d'Edouard romancier en quête du roman "idéal".André Gide a rêvé très tôt d'être un écrivain et surtout un auteur publié malgré sa peur constante de ne pas être à la hauteur. Mais, il ne voulait pas  que se contenter d'écrire , il voulait révolutionner la littérature. Edouard a les mêmes ambitions et  lui sert donc de porte voix pour énoncer ses pensées à travers son journal. Journal que lui même publiera à la suite des Faux monnayeurs pour expliquer la genèse de son roman. Mais Edouard ne lui ressemble pas car il ne  publiera pas de roman, il ne sera qu'un romancier raté. Il incarne tous les questionnements et doutes d'André Gide face à l'acte d'écriture.
Cependant, il est intéressant d'observer  que la vie des personnages secondaires sont aussi en quelque sorte une mise en abîme de la vie d'André Gide. Sa propre histoire est en fait le reflet de tout l'oeuvre.



dimanche 26 mars 2017


"Dans un monde ou chacun triche, c'est l'homme vrai qui fait figure de charlatant"- Les faux-Monnayeurs.
Comme a pu le dire Léa dans sa dissertation ;  André Gide, dans sa cinquième conférence sur Dostoïevski, dit le proverbe suivant : « Il n'y a pas d'œuvre d'art sans collaboration du démon » 


Les faux Monnayeurs d'André Gide est l'exemple parfait de cette citation. En effet dans cette oeuvre aux multiples intrigues, la présence de l'ange et du démon se fait ressentir a travers de multiples personnage. De ce fait, l'oeuvre dans toute sa complexité devient le théâtre de manifestation angéliques et maléfiques tout au long de l'ouvrage. Mais comment se manifeste cette présence?

Il est vrai que, dans Les Faux-Monnayeurs, des personnages extrêmement touchants, authentiques, criants de vérité, mais ils croisent de vrais personnages romanesques, manichéens, et, pour ceux-là, diaboliques. Le diable est effectivement présent dans le roman, au travers des figures tentatrices qui, semble-t-il, reviennent sous différents traits de génération en génération. Les fils Molinier semblent tous confrontés à l’un de ces démons et se laisseront tous tenter : Vincent par Lady Griffith, le petit Georges par Ghéridanisol et Olivier par le Comte de Passavant. Ce dernier, présenté en mondain manipulateur et vil, marionnettiste pervers, figure à lui seul une sorte de diable, manipulant à l’envi des sous-fifres pour répandre le soufre auprès des jeunes adolescents. À cette image diabolique, s’oppose celle de l’ange : Bernard rencontre effectivement un ange (car tout est permis dans le roman), et lutte contre lui toute une nuit. Ce passage est très troublant, la figure merveilleuse de l’ange étant très inhabituelle, d’autant plus dans un roman tentant de reproduire le réel et critiquant vigoureusement la religion, mais aussi très puissante. Le combat entre Bernard et l’ange ne verra pas de vainqueur, mais cette lutte renforce l’aspect initiatique du roman et métaphorise les combats spirituels et les allants vers l’inconnu que doit mener le jeune Bernard dans la construction de sa personne, dans sa formation existentielle pour devenir adulte. C’est d’ailleurs le jour où il obtient le bac qu’il fera cette rencontre angélique.
Nous pouvons maintenant revenir au diable, une figure bien plus intéressante dans cette oeuvre: le Comte de Passavant est également l’antagoniste littéraire d’Édouard, lui-même étant auteur à succès. Les deux personnages s’affrontent sur différents plans, intellectuels et romanesques évidemment, les deux personnages représentant tous deux des conceptions littéraires antithétiques, l’une facile et commerciale, l’autre élitiste et révolutionnaire. Mais ils se disputent également Olivier, le jeune et brillant neveu d’Édouard. Les sentiments qu’Olivier et Édouard partagent sont très ambigus, incestueux, mais l’assentiment du lecteur envers Passavant est tel qu’on souhaite voir Édouard sortir victorieux dans ce combat ! Le personnage de Passavant est de ceux qu’on adore détester, il représente tout ce qui répugne : le vice, la malice, l’argent facile, la mondanité,la volonté de corrompre tout ce qui est pur, beau.
Cette question de l’authenticité, de la sincérité et de la duplicité est au cœur du roman et est métaphorisée par un trafic de fausses monnaies dont l’enquête apparaît discrètement au lecteur, en arrière-plan, dans quelques dialogues. Mais elle est présente et permet à l’auteur de mettre en question le paraître, ce qu’on laisse paraître de soi et en quoi cette démarche est significative de qui l’on est réellement. Car tout, que ce soit les actes sincères ou les duperies, tout nous construit et tout nous révèle. Les Faux-Monnayeurs, ce sont au final ces personnages qui n’osent pas, qui se trompent, qui laissent à paraître ce qu’ils ne pensent pas, ce qu’ils ne sont pas, ces gens qui sonnent faux, qui donnent de fausses amitiés, de faux amours, de fausses bonnes intentions, qui s’oublient dans ce qu’ils souhaitent donner à penser et qui en oublient d’être justes et vrais. Et c’est paradoxalement en cela qu’ils sont authentiques, vraisemblables.

Nous pouvons donc en arriver a la conclusion que le démon est bien plus présent dans l'ouvre d'André Gide, et semble torturer l'ange. En effet, les personnages "maléfiques" comme Passavant sont un obstacle bien réel aux personnages angéliques. Ce roman est comme une personne vivante, un exemple de la société. Il évolue et change au même rythme que la vision du lecteur, et c'est cette "aventure d'une écriture" comme il a été dit en classe qui rend cette vision, cette impression de l'ange et du démon plus réel, plus vivante.

L'ange et le diable - Article de Layal

Dans le JFM, André Gide écrit QUE le diable "pourrait bien devenir le sujet central de tout le livre, c'est à dire le pOint invisible autour de quoi TOUT gravirait". La complexité des personnages, qui naviguent entre le bien et le mal symbolise bien cette œuvre qui cherche à dénoncer que LES relations humaines, parfois heureuses, sont toujours menacées par les passions, LES tentations et LES illusions. Comment le thème du diable et DE l'ange apparaît-il donc dans l'œuvre d'André Gide? Nous montrerons que le diable est une figure centrale du roman MAIS que l'incarnation angélique apparaît chez certains personnages. 

    Le diable est bien La figure centrale du roman ; il n'est pas incarné par un seul personnages mais au contraire se révèle comme une force invisible qui passe d'un personnage à l'autre en semant le malheur. En effet, DE très nombreuses occurrences du mal apparaissent dans l'œuvre, représentant à la fois le pêché, le diable, et les tentations. Certains personnages sont lucides sur leur lutte intérieur entre le bien et le mal et certains s'avouent même vaincu. Ainsi, Boris peut être considéré comme une victime passive comme le souligne Édouard dans son journal, car il lutte contre l'influence du demon et cherche à se rapprocher du bien. A La page 173 des FM, on peut noter cette quête : " Moi JE t'ai bien crue l'autre jour, quand tu m'as parlé des anges. Dis, Bronja : TU crois que si je priais tres fort, Moi aussi JE LES verrais? [...] Bronja, TOI, TU n'es pas méchante, c'est pour ça que tu peux voir LES anges. Moi JE serai toujours une méchant. " 
Quelques personnages se débattent entre l'ange et le demon. C'est le cas d'Olivier, tiraillé entre deux positions : il est attiré par son désir pour Édouard, son oncle MAIS résiste à la perversion en refoulant sa tentation, comme le témoigne la page 171 des FM : " cette nuit LES demons DE l'enfer l'habitèrent."
Bernard est lui en prise avec LES demons et il est indécis sur le chemin à prendre car l'église ne lui apporte PAS de réconfort. Il rejette sa famille et se rapproche de Sarah Vedel.  Il y'a une sorte de contamination diabolique dans le roman : tous les personnages sont reliés car ils sont tous coupables. Le diable est donc disséminé, Dispersé en chaque personnage. 
Vincent symbolise le mal. Dans son JFM page 69, Gide dit que " Vincent se laisse lentement pénétrer par l'esprit diabolique. Il se croit devenir le diable." Le diable est donc a l'intérieur : Gide en a d'ailleurs donné une magnifique définition : il ne s'agit pas d'une entité qui existe mais d'une métaphore pour le mensonge, le mental et c'est le sujet du livre d'Edouard : montrer "la rivalité du mOnde réel et de la représentation que nous nous faisons."
L'écrivain se doit d'explorer toutes ses faces sombres chez les personnages, quitte à donner parfois l'impression d'une obsession de la culpabilité, mais aussi une pureté morale exceptionnelle, réservée à quelques êtres "angéliques" tel que Bronja. Elle voit les anges,en est peut être déjà un et est liée à la bonté mais aussi au fait qu'elle va mourrir, donc elle restera pure à tout jamais. Boris également qui n'a rien fait est une victime culpabilisante qui est sacrifié à la fin, est perçu comme un ange. Et pour finir avec Rachel, qui est plutôt sainte qu'ange, est vierge, modeste et vertueuse, elle est perçu comme "la plus belle âme" dans l'histoire.


"Il n'y a pas d'œuvre d'art sans La collaboration du démon" écrit Dostroïevski. Le diable est bien une figure centrale du roman ; il n'est pas incarné par un seul personnage mais au contraire, se révèle comme une force invisible qui passe d'un personnage à l'autre en semant le malheur.

Le bien et le mal.


La présence du diable et de l'ange dans Les Faux-monnayeurs

Lorsqu’on lit Les Faux-monnayeurs d’André Gide, on remarque des apparitions récurrentes d'anges et de démons dans le livre, qui renvoient à une lutte entre le bien et le mal des personnages. Cependant, anges et démons ne sont pas opposés de façon simpliste. En effet, leur signification est complexe. On ne sait pas s’ils sont de véritables personnages, ou s’ils sont des êtres qui viennent de « l’au-delà » comme des sortes d’envoyés par Dieu (pour les anges) ou le diable (pour les démons). Comment le thème du diable et de l'ange apparaît-il donc dans l'œuvre d'André Gide ? Afin de répondre à cette question, nous étudierons d’abord les nombreuses facette de la présence du diable, ensuite la présence de l'ange et sa remise en question.


Dans sa sixième conférence sur Dostoïevski, André Gide nous dit qu’ « Il n'y a pas d'œuvre d'art sans participation démoniaque. » Il le souligne dans Le Journal des Faux-Monnayeurs, il dit que dans « ce qui peut m'aider à dessiner un personnage » : « Je voudrais un (le diable) qui circulerait incognito à travers tout le livre et dont la réalité s'affirmerait d'autant plus qu'on croirait moins en lui.» En effet, dans Les Faux-monnayeurs on remarque rapidement une présence du diable, qui apparaît comme un sujet actif qui influe sur les personnages. Il est mentionné dès la première page, à propos de Bernard « La famille respectait sa solitude, le démon pas. » Mais le personnage le plus touché par la présence du diable, n’est nul autre que Vincent. C’est une victime de choix pour le diable « amusé ». Ce dernier succombe petit à petit au diable, et tombe dans le mal finissant par tuer Lady Griffith. Au début du roman, Vincent est personnage innocent qui a une affaire avec la jeune Laura, cependant  celle-ci était déjà mariée. C’est lorsque qu'elle tombe enceinte, que Vincent va commencer à changer. Tout d’abord, il est tiraillé par sa conscience à propos de l'argent qu'il se doit de verser à Laura pour l’aider avec sa grossesse, mais il finit par tout perdre dans un jeu d'argent. Le jeu représente le diable, c’est une tentation à laquelle Vincent cède rapidement et  c’est ainsi qu’il emprunte la route du mal. Il va  laisser  la jeune femme enceinte toute seule, sans argent, malgré les supplications de cette dernière. Vincent fait donc partie des personnages qui sont tombés dans le piège du diable. Le démon lui à fait croire « que sa lâcheté dans ses relations avec Laura était en faite une victoire contre ses instincts affectifs. »  Lady Griffith et Passavant peuvent ainsi être présentés comme les deux " démons " de Vincent, car c’est eux qui lui ont appris la facilité de l'argent, qui a d’ailleurs une force corruptrice dans le roman. A travers le personnage de Vincent, on comprend que le diable imaginé par Gide opère par sophisme, il séduit sa victime par l’intelligence et non par les sens.  

Mais Vincent n’est pas la seule victime du diable. Édouard l’est également, et il est d’ailleurs le meilleur exemple pour nous faire comprendre la méthode démoniaque. Édouard apparaît tout d’abord comme le mauvais ange de Boris « Je crains qu’en confiant le petit Boris aux Azaïs, Édouard ne commette une imprudence. […] À quels sophismes prête-t-il l’oreille ? Le diable assurément les lui souffle, car il ne les écouterait pas, venus d’autrui. » Pourtant, Édouard se persuade qu’il conspire au bien de Boris. N. David Keypour explique cela : « Je ne nie pas qu’il y ait, de par le monde, des actions nobles, généreuses, et même désintéressées ; je dis seulement que derrière le plus beau motif, souvent se cache un diable habile et qui sait tirer gain de ce qu’on croyait lui ravir. » Autrement dit, Edouard est sous l’emprise du diable lorsqu’il envoie Boris à la pension Vedel, mais il se persuade de ne pas l’être. D’ailleurs, aucun acte ne semble être réellement bon chez Édouard : il aide Laura à cacher sa grossesse alors que cette dernière est mariée, il offre de l’argent à Rachel afin que la pension des Vedel-Azaïs puisse continuer à enseigner, alors qu’il décrit péjorativement l’établissement t, il est amoureux de son neveux… Tant d’actions qui illustrent une certaine lutte entre le bien et le mal en Édouard. André Gide explique cela dans le 7ème chapitre des Faux-monnayeurs en disant que «Plus on le nie, plus on lui donne de réalité. Le diable s’affirme dans notre négation. » L’aveuglement  des personnages peut donc trouver une explication dans la puissance invisible du diable.  C’est ainsi que la plupart des personnages du roman sont tôt ou tard en contact avec le mal.
 En effet, c’est avec un grand étonnement que le lecteur voit les personnages les plus jeunes, comme Georges et Ghéridanisol,  sous l’emprise du diable. Ces derniers font partis d’un trafic de fausses pièces et vont jusqu’à pousser le petit Boris au meurtre. Leur jeune âge les aveugle, ils ignorent qu’ils sont contrôlés par le diable. Cela illustre encore la théorie d’André Gide qui prouve que c’est en niant le diable que ce dernier agit encore plus.  D’autres personnages sont aussi des instruments du démon : Passavant et Strouvilhou. Ils sont sources de mal et représentent la tentation. Passavant est le mauvais ange d’Olivier, et Strouvilhou est celui qui a pervertit le groupe d’adolescents. Ainsi, le démon est bien l'incarnation du mal qui est dans chaque personnage, et qui utilise les faiblesses des autres pour les dominer. La plus grande ruse du Diable est donc de faire croire qu'il n'existe pas, pour mieux contrôler ses victimes.

 Benjamin Crémieux qualifie Les Faux-Monnayeurs de « roman diabolique où le Ciel et l’Enfer luttent sans arrêt (40) ». C’est donc évident qu’en plus du diable, il y a également un ange. 

L’angélisme est un autre thème important du roman. L’ange, ici, « fonde l’individu en sa lutte avec l’inconnu ».  Dans Les Faux-Monnayeurs, seuls Bronja et Bernard sont capables de voir l’ange. Bernard devient mature suite à sa lutte avec l’angle : « Sa lutte avec l’ange l’avait mûri. Il ne ressemblait déjà plus à l’insouciant voleur de valise qui croyait qu’en ce monde il suffit d’oser. Il commençait à comprendre que le bonheur d’autrui fait souvent les frais de l’audace. » L'ange s’est manifesté  à Bernard, a discuté avec lui, s’est promène avec lui, et a lutté avec lui afin de le rendre bon ou meilleur. L'ange mentionne auparavant qu'il est temps pour Bernard de faire un choix.  Quant à Bronja, elle voit également les anges, cependant elle semble appartenir à un autre monde. Elle apparaît comme l’ange gardien de Boris. Elle le maintien dans l'espoir de la vie, et lorsqu’elle meurt, Boris meurt à son tour plus tard. Par ailleurs, le petit Boris ne voit pas les anges, mais il représente l’innocence tout au long du roman, une sorte d'incarnation angélique, cependant c'est sa naïveté qui va le conduire à la mort. Voilà pourquoi sa mort est choquante.On peut donc comprendre la remise en question sur le bien-fondé des interdits religieux par Gide. 
« Le diable et le Bon Dieu ne font qu’un ; ils s’entendent. Nous nous efforçons de croire que tout ce qu’il y a de mauvais sur la terre vient du diable ; mais c’est parce qu’autrement nous ne trouverions pas en nous la force de pardonner à Dieu », dit La Pérouse en s’adressant à Édouard. On peut certes mettre ces propos  sur le compte découragement et du désespoir du vieillard, mais après tout ce qu’il a vécu, on peut comprendre son point de vue. Ce dernier se sent persécuté par dieu, et ne voit aucune différence entre dieu et satan. Dieu est présenté comme un manipulateur et les Hommes sont ses jouets. L'ange et le démon ne sont donc que les visages opposés de la même entité divine.  André Gide propose ici une réflexion sur la dualité ce qui est jugé être « le bien » et ce qu’est « le mal ». Les personnages de l'ange et du démon deviennent des personnifications du bien et du mal, leur apparition souligne les conflits présents dans le roman. 

 En somme, les anges et les démons apparaissent que dans les moments de crise. Ils guident les personnages soit vers le bien, soit vers le mal. C'est ainsi qu'on assiste à une lutte entre le bien et le mal, l'ange et le démon, Dieu et le Diable. Ils sont à la fois les doubles des personnages qu'ils habitent et en même temps une manifestation de la conscience des personnages. Par ailleurs, les personnages des Faux-monnayeurs sont à la fois les anges ou les démons pour chacun, on pourrait donc conclure qu'André Gide offre ici une réflexion sur une socièté divisé, dans laquelle le bien et le mal sont confondus, et les personnes sont perdues. Le titre Les FAUX- monnayeurs, souligne bien cette confusion. Les Hommes ne savent pas de quelle côté ils sont réellements, ou ils se cachent derrière le bien pour mal agir, et ainsi de suite. « La manière dont le monde des apparences s’impose à nous et dont nous tentons d’imposer au monde extérieur notre interprétation particulière, fait le drame de notre vie » dit André Gide dans Le Journal des Faux-monnayeurs. 



Le méchant Dieu

« La plus grande malice du diable est de faire croire qu'il n'existe pas ».
(Baudelaire, Poèmes en proses)

Le diable et l'ange est un thème qui apparaît discrètement dans le roman Les faux-monnayeurs, d'André Gide; mais finalement c'est un sujet centrale. Le bien et le mal lutte tout au long de l’œuvre à travers des apparitions d'ange ou de démon, jusqu'à même la possession de personnages pendant des cours instants, et l'on retrouve également des personnages qui incarnent directement le bien ou le mal. Mais, à des fin narratives, Gide choisis que ses personnages ignorent le Diable, comme il le dit dans son journal «... tandis qu'on ne peut servir Dieu qu'en croyant en lui,le diable lui n'a pas besoin qu'on croie en lui pour le servir. Au contraire on ne le sert jamais aussi bien qu'en l'ignorant... c'est précisément là ce qu'il désire...». En accord avec la citation de Baudelaire ci-dessus, André Gide fait du diable un personnage puissant et silencieux qui provoque l'action.
Comment le thème du diable et de l'ange apparaît-il dans l’œuvre d'André Gide ?

Le diable et l'ange dans les personnages ?
Dès la première page du roman, il est question du diable :«La famille respectait sa solitude, le démon pas». Bernard vient juste de trouver des lettres prouvant qu'il est un bâtard et cet élément va débuter les péripéties du personnage. La curiosité est un vilain défaut, qui d'autre qu'un démon pour souffler à Bernard de fouiller dans les affaires de sa mère. Bernard va donc fuir, et son aventure va l’emmener dans une gare où il volera la valise d’Édouard; objet qu'il va fouiller pour détenir ensuite un autre secret. C'est encore un acte du démon, qui va même provoquer la détresse de Laura et Édouard puisse qu'il ne partage plus leur secret. Mais Bernard n'est pas un personnages mauvais, au contraire, il est le seule à voir un ange. Après son été, Bernard à évolué, il passe son bachot et ayant reçu ses examens il est touché par une certaine mélancolie, ses pas l’entraîne dans un jardin où il va apercevoir un ange. «il méditait depuis quelques instants lorsqu'il vu s'approcher de lui... un ange». Cet ange va l’emmener dans une église, malgré qu'il ne croit pas en Dieu. L'ange triomphe donc sur Bernard, plutôt que le démon, ainsi le personnage connaît une fin heureuse puisse qu'il retourne chez son père à la fin du roman; il est partit du foyer garçon il en revient homme.

«J'en voudrais un (le diable) qui circulerait incognito à travers tout le livre et dont la réalité s'affirmerait d'autant plus qu'on croirait moins en lui » exprimait André Gide dans son journal des faux-monnayeurs. Pour moi ce diable c'est Édouard. Je m'explique, Édouard semble être un personnage qui a un lien avec tout les autres protagonistes du livre. Il intervient dans l'histoire de chacun avec une «bonne volonté » qui finalement n'est pas le meilleur choix à faire. Lorsqu'il propose à Bernard de venir avec lui, Olivier est très jaloux et en vient à prendre des mauvaises décisions et fréquenter des mauvaises personnes qui finalement retrouvera le droit chemin. Édouard par s'enfuit avec Laura, qui attend un bébé or mariage, la bonne solution serait qu'elle retourne dans les bras de son mari, mais Édouard l’emmène au loin et la culpabilise de partir vu qu'il a était si doux avec elle, finalement elle y retourne. Il va chercher en suisse un petit garçon, Boris, pour aider son grand père qui souhaite rencontrer celui-ci. Acte de gentillesse? Non puisqu'il s'agit de curiosité, Édouard sait que Boris ne sera pas heureux là où il l’emmène mais il a hâte de suivre les événements, finalement Boris meurt. Plus subtilement, Édouard dissuade La Pérouse de se suicider, mais par ce fait, une balle reste dans le pistolet et cette même balle va tuer le petit Boris. Pour moi Édouard apparaît comme le diable puisque toutes ses actions sont mal, et dès qu'il part cela redevient le bien. Finalement on voit sa vrai nature à la fin du roman puisqu'il reste indifférent au suicide de Boris, pour lui tout les gens qu'il croise sont des potentiels personnages et non des gens réel. Il semble au-dessus des autres, comme le diable le ferait. Mais finalement son mal se retournerait contre lui puisse qu'il est incapable de finir son roman.

Le diable dans les figures féminines ? Dans les faux-monnayeurs, on retrouve très peu de femmes, de plus les personnages principaux sont pratiquement tous homosexuel ou bisexuel. Mais bien que rares, elles provoquent aussi le mal. Si La mère de Bernard n'avait pas trompé son mari, il n’y aurait pas eu d'histoire. Le démon adore provoquer des drames. Laura se croit mourante, et commet donc l'adultère. Lady Griffith quand à elle, séduit Vincent, alors que le plus juste serait qu'il s'occupe de la femme qui attend son enfant, de plus elle est marié, mais ça lui est complètement égale. La sœur de Laura, Sarah, pourrait représenter la luxure, puisse qu'elle s'offre à Bernard sans même le connaître. Enfin, le bien serait représenter pour moi dans la mère de George, qui fait tout pour garder sa famille uni, malgré les tromperies de son époux et semble être le personnage le plus heureux lorsque son fils lui témoigne de la tendresse à la fin du roman.

Le Bien pourrait être représenté par le personnage de Boris, le seul personnage complètement innocent. Il avait trouvé le bien, il avait une amie et un foyer où s’épanouir qu'il lui a été enlevé par le premier Diable dont j'ai parlé plutôt Édouard. Après ça c'est la descente aux enfers, sa seule amie meurt, il est seul même avec son grand père et finalement il rencontre Guéridanisol. Qui est l'autre diable du roman. Par sa folie il va provoquer la mort de Boris et n'en éprouver aucune rancœur juste comme Édouard. Le diable se retrouve aussi dans les enfants.
Finalement le personnage le plus méchant, Passavant est finalement le personnage que le diable délaisse le plus, car il faible d'esprit et mauvais écrivain. Finalement, à vouloir autant le mal de ses personnages, Gide s'apparente peut être au démon aussi.

Le dieu diable?
Paradoxe, en effet. Le dieu du roman serait il un diable? Ma théorie se crée grâce à un passage. Après le suicide du petit Boris, Édouard va rendre visite à La Pérouse, qui ayant tout perdu s'exprime sur Dieu. «... Le diable et le Bon Dieu ne font qu'un ; ils s'entendent...». Sans dieu, le diable n'existe pas et vice versa, et les deux entités s'acharnent sur les personnages si bien qu'on en vient à penser que le Dieu n'est là que pour aider les protagoniste à continuer le récit, à trouver la force pour mieux ressentir le mal. Olivier abandonne et tente de se suicider, mais le diable le sauve. En fait on aurait droit à un dieu trompeur, qui nous aurait dôter de raison pour mieux se moquer de nous. Il s'agirait peut être d'une mauvaise interprétation de Descartes qui d'abord parle d'un Dieu méchant puisqu'il nous force à nous tromper mais finalement le philosophe nous prouve qu'il existe un dieu, philosophique puisque, étant conscient de notre imperfection, en nous serait encré une idée de perfection;Dieu. La Pérouse serait en plein doute, et Gide aussi. Le personnage qualifie même le dieu de cruel, puisque pour nous sauver il aurait sacrifier son propre fils ; tel que pour finir le roman et permettre au personnage de vivre, Gide aurait sacrifier le petit Boris.

En outre, le thème du diable et de l'ange apparaît dans plusieurs aspect du roman, via les personnages, mais aussi des questionnement philosophique. Le diable de Gide ne serait-il pas aussi le Dieu ? Et si le roman prend fin c'est peut être parce que les personnages prennent conscience de l'existence du diable, via la mort de Boris, et donc l'histoire ne peut plus continuer? De plus, l'écrivain en générale, créant la vie, ne prend t'il pas la place de Dieu?


samedi 25 mars 2017

"Le point invisible autour duquel tout graviterait..."

Dans le journal des Faux-Monnayeurs (2e cahier), André Gide écrit vouloir "sortir le roman de son ornière réaliste". C’est pour cela que dès la quatrième phrase du roman il glisse «un élément fantastique et surnaturel, qui autorise par la suite certains écarts du récit, certaines irréalités". De fait, cet élément est la première référence au «démon». André Gide confère une dimension métaphysique à son œuvre en multipliant les références au diable et, par opposition, aux anges. Selon lui le thème de l’ange et du diable "pourrait bien devenir le sujet central du livre, c'est-à-dire le point invisible autour duquel tout graviterait...". Nous nous demanderons comment le thème de l'ange et du diable apparaît dans l’œuvre de Gide.

André Gide souhaite qu’un personnage circule (JFM) «incognito à travers tout le livre et dont la réalité s'affirmerait d'autant plus qu'on croirait moins en lui». Selon lui, c’est le propre du diable. En effet, comme l’explique le traité de la non existence du diable: «Plus on le nie, plus on lui donne de réalité. Le diable s'affirme dans la négation". Tout ce qui n’est pas contrôlé, la part de hasard, les détails que l’on ne prévoit pas, tombent dans les griffes du diable et définissent notre vie. Le personnage de Vincent vient illustrer ce traité qu’André Gide note dans le journal des Faux-Monnayeurs. En effet, Vincent nie le diable, mais ce faisant il lui permet de s’affirmer en lui comme le montre l’extrait suivant (1e partie, chap. XVI): "la culture positive de Vincent le retenait de croire au surnaturel; ce qui donnait au démon de grands avantages [...] A partir de quoi, l’être qui se croit le plus libre, n’est plus qu’un instrument à son [démon] service». Parce que Vincent est pragmatique il est une proie facile. Il ne voit pas de caractère diabolique évoluer en lui. La décadence de Vincent est progressive et atteint son point culminant lorsqu’il arrive chez Alexandre Vedel en Afrique. Grâce à la lettre qu’Armand reçoit de son frère, le lecteur apprend que Vincent finit par (3e partie, chap. XVI) « se croi[re] le diable lui-même ».  Le diable a prit possession de lui et se manifeste dans sa folie. Le lecteur apprend également que Vincent « parle sans cesse de mains coupées ». Cette référence, directement extraite du récit d’un naufrage que lui a été fait par Lady Griffith, suggère que Vincent a été traumatisé par ces images qui lui reviennent sans cesse et qu’elles le pervertissent.
En effet, l’entreprise du diable est de faire naître la tentation pour influencer, pour pervertir ses victimes. Dans le deuxième chapitre de la première partie, Oscar Molinier fait l’état des lieux d’une enquête scandaleuse qui impliquerait des lycéens et des femmes de joie. Il dit au père de Bernard: «il me paraît que nous avons affaire ici à quelques créatures d’une insondable perversité et dont il importe de nettoyer la société [...] Songez que trois d’entre eux n’ont pas 14 ans et que les parents les considèrent comme des anges de pureté et d’innocence». Le père d’Olivier accuse les prostituées de pervertir leurs jeunes clients. Il y a d’emblée une opposition entre des personnages supposément diaboliques et apparemment angéliques. Le diable aurait donc à son service des meneurs, des mentors du mal qui lui amèneraient de la pureté à entacher. Il y a donc dans le roman de Gide des personnages purement maléfiques: (2e parte, chap.VII) « ils sont sans loi, sans maître et sans scrupules ; libres et spontanés, ils font le désespoir du romancier ». Cet extrait fait référence à Lady Griffith et à Passavant. Ces derniers ont seulement l’illusion d’être libre et sans maître puisqu’ils subissent leurs passions et que leur maître est en vérité le diable. Tout élan spontané, paraissant libre est, comme nous l’avons dit plus haut, laissé entre les mains du diable (c.f. liaison Vincent-Laura). Passavant est damné, comme pourrait le suggérer l’épigraphe du quatrième chapitre de la première partie: « sa mère était quiétiste et lui disait souvent « mon fils vous serez damné. Mais cela ne lui faisait point de peine » » (citation Fontenelle). Il ne semble pas s’en émouvoir car il a sûrement déjà passé l’étape de l’acceptation comme celle que vivra Vincent en Afrique. Il faut, par conséquent voir dans la morale de Passavant («l’important dans la vie c’est de ne pas se laisser entraîner» - 2e partie, chap. V) un semblant d’ironie. Lady Griffith et Passavant pervertissent ainsi Vincent et parce que Vincent devient lui-même un suppôt du diable, «le démon n’aura de cesse que Vincent n’ait livré son frère à ce suppôt damné qu’est Passavant.»
Le but des meneurs, le triomphe du mal, semble être la ligne directrice des Faux-Monnayeurs. En effet, certains actes subversifs révèlent une nécessité qui ne peut que s’inscrire dans le but de faire triompher le mal. Par exemple, le narrateur dit au sujet de Bernard (partie 1, chap. X) «le démon ne permettra pas qu’il se perde» pour ne pas qu’il rate le vol de la valise, il le mène à son destin. En effet, sans ce vol, Bernard n’aurait pas connu Édouard et Olivier ne se serait pas jeté dans les bras de Passavant. La Pérouse signale que le monde qui l’entoure a perdu l’équilibre entre l’ordre du bien et du mal depuis bien longtemps: (1e partie, chap XVIII) «oui...mais tout notre univers est en proie à la discordance». De même, après que Bronja ait une attaque de spasmes, Édouard rappelle à Sophroniska qu’elle agit (2e partie, chap. III) «comme si le bien devait toujours triompher du mal». La fin des Faux-Monnayeurs parait confirmer la contingence du triomphe de bien. Ghéridanisol, autre personnage maléfique, arrive sans grande difficulté à entraîner ses camarades dans des pratiques subversives et dangereuses qui remettent en question le principe même de la vie avec sa Confrérie des Hommes ayant pour principe: (p368) "L’homme fort ne t[ient] pas à la vie". La mort de Boris a l’air d’être le symbole du triomphe du Mal. Elle entraîne la faillite de la pension Védel-Azaïs qui avait pour prétention servir Dieu et par conséquent  la victoire du diable.

Le triomphe du mal se révèle donc être le triomphe du diable.

Cette opposition omniprésente entre l’ange et le démon apparaît sous la forme morale d’une opposition plus générale entre ce qui est établit comme bien ou mal. L’influence du diable se traduit d’une part dans le péché de la chair, la luxure. Il y a dans le roman d’André Gide de multiples liaisons amoureuses immorales. Les Faux-Monnayeurs d’André Gide semble graviter autour de ces intrigues amoureuses. En effet, le roman s’ouvre sur la découverte de l’infidélité de Marguerite, la mère de Bernard. S’ensuit l’évocation de l’affaire des jeunes lycéens et des prostituées. L’infidélité de Laura avec Vincent les compromet tous deux et contraint Vincent à fréquenter Passavant par soucis d’argent. C’est également à cause de cette histoire qu’Édouard revient à Paris et c’est aussi à cause de la découverte des événements par Bernard que ces derniers se lient. Édouard a également des motivations lubriques pour son retour à Paris comme l’atteste cet extrait: (p74) «il a été terriblement sevré de plaisir, ces temps derniers, en Angleterre; à Paris, la première chose qu’il fera, c’est d’aller dans un mauvais lieu». Lady Griffith quant à elle, est une libertine. Alors qu’elle dit être amoureuse de Vincent, elle laisse Passavant lui faire des avances et lui dévoile, amusée:  (p57) «Mais, mon cher..., c’est que je crois bien me souvenir que j’ai oublié un mari en Angleterre. Quoi! je ne vous l’avez pas déjà dit?». Plus tard, dans la même soirée, sous l’œil malveillant du diable, elle invite Vincent à la rejoindre dans sa chambre: (p59) «c’était l’heure douteuse où s’achève la nuit, et où le diable fait ses comptes». La découverte d’une lettre prouvant l’infidélité d’Oscar Molinier permet à Georges de se faire accepter dans la Confrérie des Hommes forts et se place au début d’une longue série d’agissements immoraux. Enfin, la relation charnelle qu’entretiennent Bernard et Sarah rajoute de la complexité dans les rapports d’Olivier à Bernard et distraient ce dernier du péril dans lequel se trouve Boris.
D’autres comportement subversifs marquent la présence du diable dans le roman: L’orgueil de Passavant notamment, le trafic de fausses monnaies commandité par Ghéridanisol au sein de la Confrérie des Hommes forts, les jeux d’argent dans lesquels tombe Vincent entraîné par Passavant etc.
Enfin, la prépondérance de l’immoralité souligne en contrepartie la petite place qu’a la vertu. Il s’agit du tragique moral, d’après Édouard, «c’est ce tragique là qui l’emporte». La faible  présence du bien a pour cause, d’après La Pérouse, le silence de Dieu. En effet, il déclare (3e partie, chap.XVIII): «Avez-vous remarqué que dans ce monde, Dieu se tait toujours. Il n’y a que le diable qui parle». Ce Dieu silencieux s’efface des considérations derrière le diable qui prend le dessus: «le diable et le Bon Dieu ne font qu’un; ils s’entendent. Nous nous efforçons de croire que tout ce qu’il y a de mauvais sur la terre vient du diable; mais c’est parce qu’autrement nous ne trouverions pas en nous la force de pardonner Dieu. Il s’amuse avec nous, comme un chat avec la souris qu’il tourmente». En effet, Dieu semble envoyer (1e partie, chap. XIII) «des tentations auxquelles il sait que nous ne pourrons pas résister». Sans lumière, La Pérouse se noie dans son désespoir. Armand et Sarah Védel, quant à eux, témoignent de la domination du mal. En effet, ils rejettent tout enseignement moral comme le fait Marguerite après la fugue de Bernard (première partie, chap II): «Voilà l’expiation, dit [Albéric Profitendieu] [...] il voudrait lui dire à présent que cette épreuve pourra servri à son rachat [...] Marguerite sait bien que toujours quelque enseignement moral doit sortir des moindres événements de la vie». Bien que leur famille dirige la pension chrétienne Védel-Azaïs, ils sombrent du côté du diable. En effet, Armand déclare dans le seizième chapitre de la troisième partie que ce qu’il a de plus sincère en lui, «c’est la haine de tout ce qu’on appelle vertu». Pareillement, lors d’une altercation avec sa soeur Rachel, Sarah lui rétorque qu’ (p340) «elle n’avait pas le droit d’imposer aux autres une vertu que son exemple suffisait à rendre odieuse». Sarah comme Armand ne (p341) «croi[ent] pas [au] ciel. [Ils] ne veu[lent] pas être sauvé[s]»

Néanmoins, bien que la place de la vertu paraisse secondaire, elle n’est pas totalement abandonnée comme témoigne la présence des anges.

L’église, le jardin du Luxembourg et Saas-Fée sont décris de manière poétique et fantastique ce qui permet l’apparition des anges de manière plus naturelle. En effet, le jardin du Luxembourg est suspendu dans le temps. L’ange se fond dans le décor (p332) «Il méditait depuis quelques instants, lorsqu’il vit s’approcher de lui, glissant et d’un pied si léger qu’on sentait qu’il eût pu poser sur les flots, un ange. Bernard n’avait jamais vu d’anges, mais il n’hésita pas un instant». Le nom de Saas-Fée évoque en lui même un imaginaire féerique. Bernard décrit Saas-Fée comme un lieu coupé du monde, du réel, tout à fait atemporel et près des cieux: (deuxième partie, chap.I) «Quand on est là-haut, qu’on a perdu de vue toute culture, toute végétation, tout ce qui rappelle l’avarice, la sottise des hommes, on a envie de chanter, de rire, de pleurer, de voler, de piquer une tête en plein ciel».
Les anges apparaissent dans des moments critiques. Lorsque Bernard doit décider ce qu’il va faire de son avenir, un ange apparaît et lui propose de s’engager (3e partie, chap. XIII): «Laisseras-tu disposer de toi le hasard?». Cette question fait référence au diable qui réside, comme nous l’avons dit auparavant, dans l’illusion de liberté, dans le hasard, dans ce qui n’est pas contrôlé. Il s’agit ici non pas de devenir «un brave petit soldat du Christ» comme le souhaiterait Azaïs mais de ne pas se laisser entraîner par les tentations du diable. Après cette intervention et la combat entre Bernard et l’ange que lui seul peut voir, sa relation avec Sarah ira subitement à son terme et un temps après, il retournera dans le foyer familial. Bronja peut également voir les anges, elle est, de fait, le personnage le plus angélique. Elle est le seul ange que peut voir Boris.
En effet, Bronja sera maintes fois qualifiée d'"angélique». Le lecteur sait qu’elle a la capacité de «voir les anges». Dans cette mesure, la mort de Boris qui suit de près celle de Bronja n’apparaît plus comme le triomphe du mal mais le contraire. Dans le chapitre XVII de la troisième partie, Boris apprend la mort de Bronja et pense: «une âme tendre comme la sienne a besoin de quelqu’un vers qui porter en offrande sa noblesse et sa pureté». En mourant, Boris se sacrifie et ce faisant il ne commet pas un acte «indécent» comme l’écrit Édouard, mais permet l’identification du mal. Or, d’après le traité de la non-existence du diable, le diable n’existe que si l’on le nie, autrement dit, la mort de Boris permet d’ouvrir les yeux des personnes sous l’influence du diable. C’est en d’autres termes la victoire de Dieu puisque qu’elle remet les enfants égarés sur le droit chemin: «Pauline eut un élan de reconnaissance vers Dieu, qui, par ce drame affreux, ramenait à elle son fils».

Pour conclure nous pouvons affirmer que bien que l’opposition entre ange et diable n’est pas le sujet central des Faux-Monnayeurs il est omniprésent puisque autour de lui gravitent nombre des intrigues du roman. Au delà de la dimension métaphysique le thème de l’ange et du diable peut ouvrir une réflexion purement psychanalytique. Les conseils que le diable murmure aux oreilles de ses victimes ne pourraient-ils pas être simplement la manifestation du ça. Ainsi, lorsque les anges feraient des apparitions que seule la victime du diable pourrait voir, il s’agirait du surmoi interne cherchant à guider vers  la bonne voie.

Portrait parisien








Si les Faux-Moannayeurs était un tableau ce serait Bouquinistes de Notre-Dame d'Antoine Blanchard, représentant l'allée des bouquinistes de Paris. Les bouquinistes de Paris sont des libraires de livres anciens et d'occasion, présents sur une grande partie des quais de Seine.
C'est dans ce décor qu'Edouard surprend Georges en train de voler un livre, c'est un lieu où se joue un épisode important de l'intrigue des Faux-Monnayeurs.Paris est la ville qui occupe la plus grande partie de l'oeuvre, le lieu central de l'intrigue. Là ou s'ouvre et se ferme le roman.
Mais les procédés artistiques du peintres n' en font pas du tableau une représentation fidèle et réaliste de la ville, Tout comme le sont les descriptions de Gide, qui laisse place à l'imagination et qui en limitent pas les représentations. Les traits de l'artiste en sont pas destinés à rendre le lieu représenté précis, mais seulement l'évoquer.
Mais l'ancrage spatial dans LFM n'est pas tout de même imprécis et certains lieux de Paris s'ont souvent évoqués, et sont récurrente comme le jardin du Luxembourg qui est le lieu ou se tiendra le trafic de fausse monnaie. Il est vrai que dans le roman, les lieux sont évoqués plus que décrit. En effet, Gide en fait pas dans la description à la Balzac mais reste précis sans tomber dans le réalisme ce qui renforce le coté onirique du roman. Mais ces lieux, parisiens sont des lieux chers et familiers à Gide et il s'en inspire de ces lieux familiers. Par exemple le jardin du Luxembourg lui était familier car il y a allait avec son père étant enfant

De plus , avec la dominance du thème littéraire dans l'oeuvre il m'a parut pertinent de prendre une toile qui représente des vendeurs de livres.

Ange et diable tels le yin et le yang

André Gide, dans sa cinquième conférence sur Dostoïevski, dit le proverbe suivant : « Il n'y a pas d'œuvre d'art sans collaboration du démon » 
Dans son ouvrage « Les faux monnayeurs », ce dernier aborde plusieurs thèmes variés, qui peuvent perdre le lecteur dans sa lecture. Un des thèmes qui ressort le plus quant aux personnages de ce roman est celui du démon et de l’ange. 
Comment le thème du diable et de l’ange apprit il chez André Gide ? 
Nous nous questionnerons sur sa présence dans le roman dans un premier temps, puis dans un second temps il s’agira que se questionner sur la raison de sa présence dans ce livre, la raison pour laquelle Gide aborde ce thème de manière si récurrente, et pourquoi selon lui une oeuvre ne peut être sans collaboration du démon. 



Tout d’abord, nous remarquons à travers l’ouvrage de manière générale, une certaine récurrence de ce thème.
Tout d’abord et en premier lieu, le mot « démon » est introduit dès la première page par André Gide : « la famille respectait sa solitude; le démon pas » (en parlant de Bernard). Ainsi, l’auteur confirme son proverbe que nous avons cité selon lequel une oeuvre ne peut être écrite sans collaboration du diable, et plonge le lecteur dès la première page dans ce qui va être par la suite tout un jeu de bataille entre le mal et le bien. Le thème du démon apparait ensuite à de très nombreuses reprises. Nous pouvons par exemple citer la page 142, où le mot « diable » est repris au moins 5 fois, et le mot « démon » plus de deux fois (Il est question de Vincent dans ce passage) ou encore la page 215, où le mot « diable » est évoqué une fois ainsi que le mot « religion » - qui peut être opposé au thème du diable - (il est ici question du petit Boris dans ce passage). 
Certains personnages, comme nous pouvons le constater, sont « maléfiques ». Nous pouvons ici parler de Passavant, écrivain médisant qui s’oppose en tous points au personnage d’Edouard - quant à leur style d’écriture, leurs caractères, leur carrière - Lady Griffith, qui elle peut s’opposer au personnage de Laura par rapport à Vincent, ainsi que « la confrérie  des hommes forts », qui va être la cause du suicide malencontreux du petit Boris, et vont faire basculer la fin du roman à nouveau dans une domination du démon. 
Nous pouvons remarquer qu’une sorte de schéma se dessine, et les personnages peuvent être classés dans trois catégories différentes : A gauche les agents du démon. Puis au milieu nous avons les agents du malheur involontaire : le petit Boris par son suicide, ou encore les personnages qui sont habités par diable ET ange, par exemple Vincent qui a l’air mauvais de part son comportement envers Laura, mais qui en fait s’avère être bon au fond (On peut ici faire référence au livre Faust de l’écrivain allemand Goethe, qui dit qu’elle est l’oeuvre « d'un être troublé par la passion, qui peut obscurcir l'esprit de l'homme »). Enfin à droite nous avons les agents du bien, les anges. Parmi ces derniers nous pouvons par exemple citer Edouard, qui est celui qui amène le petit Boris à La Pérouse, dont néanmoins le rôle peut être remit en question puisse que finalement le petit Boris va apporter le malheur par son suicide (Kant dirait pourtant que seule la bonne volonté compte, et c’est bien ce qui a l’air d’animer Edouard ici). Nous pouvons citer (toujours dans le thème du bien, de l’ange), nous pouvons également citer le passage où un ange apparait à Bernard, ou encore le fait que la petite Bronja aie l’aptitude de voire des anges. Finalement ce personnage n’est il pas l’ange gardien de Boris ? - car en effet quand elle meurt ce dernier bascule du « mauvais coté » en suivant la confrérie des Hommes forts.

André Gide crée ainsi dans son roman, une alternance bien visible entre démon et ange. Mais dans quel but crée il cette alternance ? 

Et si le but d’André Gide était finalement de créer un certain équilibre par l’alternance de ces deux thèmes dans son ouvrage ?
En effet, nous savons que pour qu’une chose soit neutre, il ne faut ni trop la faire pencher à gauche ni trop la faire pencher à droite. C’est à ce jeux de balance auquel joue Gide à travers ce roman. Comme nous l’avons vu et analysé ci contre, le thème du diable est aussi récurent et aussi fort que le thème de l’ange, avec une multitude de personnages qui sont malfaisant, d’autres qui sont ni bons ni mauvais ou encore d’autres qui sont essentiellement bons. Il n’y a donc, dans cette oeuvre, ni trop de mal, ni trop de bien. L’équilibre entre ces deux thèmes, crée finalement chez André Gide une sorte d’équilibre qui fait que le lecteur, malgré la densité et complexité du livre, puisse avoir comme un point de repère, une base « neutre », les deux thèmes s’annulant. Car en effet « les faux monnayeurs » qui est un roman qui peut s’apparenter à un roman d’aventure de part le périple de Bernard (depuis son départ, sa fugue, à son retour) ainsi que la diversité des points de vue, la complexité des personnages, est un roman compliqué à suivre pour son lecteur qui se noie sous l’abondance d’information, et cette alternance peut être vu comme une volonté d’André Gide de créer une sorte d’équilibre.
Cet volonté de créer un équilibre peut être vu à la façon dont est construit le roman : au début du livre est évoqué le mot « démon ». C’est en effet une partie caractérisée par la domination de ce dernier sur le personnage de Bernard qui finalement va fuguer de chez lui. Puis, le milieu du livre (qui a lieu à Saas-Fée) est un moment qui peut être vu comme pur (de part les paysages de montagne blancs, la petit Bonjra, ange gardien de Boris, …), puis il y a un re basculement vers la domination du démon, avec le suicide involontaire su petit Boris, et enfin une certaine once d’espoir avec le retour de Bernard chez son père. Il y a donc une certain triomphe du mal dans la fin ce roman (avec la triste mort du personnage de Boris, petit fils de La pérouse), mais qui est contrasté par la restructuration familiale.


Ainsi, Gide contraste les thèmes d’ange et de démon à travers l’intégralité de l’ouvrage, et nous pourrions émettre l’hypothèse que cette alternance est crée par l’auteur dans le but que créer un certain équilibre dans son ouvrage, qui partait déstructuré aux yeux du lecteur. Sa citation dans sa cinquième conférence sur Dostoïevski que nous avons mentionnée plus haut peut donc ici être valable dans le sens où une oeuvre où il n’y a que l’intervention du bien ne peut être neutre, il faut pour cela que le démon intervienne, pour qu’au final les deux s’annulent. 

Ange & Démon


A peine plongé dans l'univers des Faux-Monnayeurs on se rend compte que le thème de l'ange et du démon est une thématique très récurrente dans l'oeuvre. Mais l'apparition répétitive de ce thème est loin d’être anodine et sa signification est complexe. Le terme du "démon" est plein de sens tout aussi différent les uns des autres. Néanmoins le démon dont il est ici question n'est autre que le "démon biblique" celui présent depuis bien des siècles dans l'esprit des hommes: l’ange déchu, révolté contre Dieu, et dans lequel repose l'esprit du mal, avec toute la mythologie du Diable et de Satan, le prince des démons. Et à cette image diabolique s'oppose celle de l'ange qui toutefois possède une envergure beaucoup plus faible que son antagoniste. Nous pouvons alors nous demander, comment le thème du diable et de l'ange apparaît-il dans l'oeuvre d'André Gide ? 


Il apparaît sous plusieurs formes et à chacune d'elles sa signification. Premièrement à travers les personnages. Il est dans Les Faux-Monnayeurs des personnages extrêmement touchants, criants de vérité, authentiques: Ils sont le reflet de la personnalité Gidienne. Le diable est effectivement présent dans le roman, au travers des figures tentatrices qui, semble-t-il, reviennent sous différents traits de génération en génération. (A savoir que les personnages des Faux-Monnayeurs représentent les personnalités diverses de Gide à ses différents âges.) De ce fait, tous les aveuglements dramatiques des personnages peuvent trouver leur explication dans la puissance invisible du Diable. Mais peut-être sont ils surtout, pour Gide, la manière de rendre plus clairement intelligible la lutte intérieure entre le bien et le mal de ses personnages ?



La première rencontre avec le démon se fait au début de l'incipit du roman avec Bernard: "La famille respectait sa solitude, le démon pas" (I, page: 13) Dès ces premières lignes, le démon apparaît alors comme un sujet influençant les personnages. Montrant ainsi que la figure de Satan telle que la conçoit le romancier pour Les Faux-Monnayeurs se distingue du daimon socratique, qui s’exprime sur un mode inductif, influençant plutôt que dirigeant la pensée de son destinataire. Sauf que la ruse du diable réside dans sa manifestation et sa façon d'agir. Car à travers ses interventions, il apparaît comme un sujet actif qui influe sur les personnages. Il disparaît pendant un moment et se fait oublier de nos esprits de lecteur avant de réapparaître avec Vincent qui ressent un sentiment de culpabilité à propos de l'argent qu'il se doit verser à Laura. Comme à son habitude le démon agit donc de façon sournoise et vicieuse auprès de Vincent, d'Olivier, d'Édouard, ou encore du petit Boris et apparaît lui même comme un personnage à part entière. De cette façon Les fils Molinier semblent tous confrontés à l’un de ces démons et se laisseront tous tenter : Vincent par Lady Griffith, le petit Georges par Ghéridanisol et Olivier par le Comte de Passavant. Ce dernier, présenté en mondain manipulateur et vil, marionnettiste pervers, figure à lui seul une sorte de diable, manipulant les jeunes adolescents.


Toutefois l'erreur de Bernard ou plutôt sa "naïveté" était son refus de voir mais aussi de croire et par ce refus, comme Vincent, « enforçait » le diable: "La culture positive de Vincent le retenait de croire au surnaturel ; ce qui donnait au démon de grands avantages. Le démon n’attaquait pas Vincent de front ; il s’en prenait à lui d’une manière retorse et furtive." (page: 156, Olivier chez Passavant, FM). Or nier la présence du Diable comme le fait Bernard au début de l’incipit des Faux-Monnayeurs, ce n’est pas seulement laisser transparaître un peu de son caractère mais se mentir à soi même, refuser de voir la vérité. Par la même occasion il ouvre une brèche à son âme et y donne un accès libre à toutes les tentations du malin. Gide en arrive à la conclusion qu’«il n’y a pas d’œuvre d’art sans participation démoniaque». C’est aussi se mentir à soi-même que de jouer au sincère sans l’être, basculer dans le clan des faux-monnayeurs, refuser d’affronter le mal et la souffrance qui font grandir, refuser d’admettre ce que Gide, lui-même, a bien eu du mal à accepter, à savoir que pour progresser il ne faut pas seulement renoncer à la vision du monde bourgeois, il faut aussi renoncer à la morale chrétienne traditionnelle, c'est à dire accepter d’aller voir du côté du... Diable. 



C'est tout cela qui est mis en jeu dans l'incipit: l'idée de la «sincérité» ou de la «liberté», du  «mensonge à soi » et des «raisons qu’on se donne». A contrario l'image diabolique, s’oppose à celle de l’ange : Bernard rencontre effectivement un ange et lutte contre lui toute une nuit. Un passage à la fois paradoxale et troublant puisque la figure merveilleuse de l’ange est très inhabituelle, d’autant plus dans un roman tentant de reproduire le réel et critiquant vigoureusement la religion. Le combat entre Bernard et l’ange ne verra pas de vainqueur (même si La Pérouse suggère que l'ange et le démon ne sont que les visages opposés de la même entité divine) mais cette lutte renforce l’aspect initiatique du roman et métaphorise les combats spirituels que doit mener le jeune Bernard dans la construction de sa personne, dans sa formation existentielle pour devenir adulte. C’est d’ailleurs le jour où il obtient son bachot qu’il fera cette rencontre angélique.


L'ange est doté d'une enveloppe matérielle. Il se manifeste à Bernard en discutant avec lui, en se promenant avec lui, en luttant avec lui. L'ange d'ailleurs "se détourne pour pleurer" il est donc en mesure de ressentir des sentiments tout comme un personnage: il vit.  Quant à Bronja, elle voit les anges, non pas parce-que elle est détentrice de don mais plutôt parce qu'elle fait déjà partie d'un autre monde. Elle est la seule avec Bernard qui est capable de le voir cependant Bernard lui, ne voit l'ange que lorsque ce dernier le décide. Toutefois le jeune Boris, essaye désespérément de "voir les anges" (expression métaphorique) ). L'ange qui visite Bernard vient l'avertir qu'il est temps de faire un choix. On pourrait alors se demander si l'ange ne vient pas tenter Bernard à la manière du démon. On en déduit alors que l'ange et le démon ne sont pas opposés de façon simpliste qu'on aurait tendance à croire. La Pérouse dira à ce propos que "le diable et le bon Dieu ne font qu'un", car tous deux déchirent les hommes. "Dieu m'a roulé, il s'amuse. Il nous envoie des tentations auxquelles il sait que nous ne pouvons pas résister ; et quand nous résistons, il se venge plus encore". C'est ici un dieu méchant, voir même malicieux.



Il en vient à dire que nos "deux entités divines" apparaissent alors comme des thèmes riches de sens et de symboliques.  Quand les personnages doutent et sont aux prises avec leur conscience ils se manifestent. Les appréhensions de Vincent sont l'expression même de sa conscience. Une fois éteinte, tous les démons auquel il ne croit pas pourront s'emparer de son âme : le démon du jeu, celui de l'ennui, celui de la folie. Bronja, elle, a créé ses anges pour vivre avec eux dans un monde épuré. Ils sont dans son seul esprit, où Boris ne peut les rejoindre. Bronja est le «bon ange» de Boris. Ainsi lorsque elle disparaît, Boris se dirige vers la mort. De même Bernard conduit l'ange dans sa chambre, mais il est le seul à le voir et seulement parce-que l'ange le veut. Avec La Pérouse, on comprend que le vieillard accuse tous les autres de l'avoir trompé alors qu'en réalité il est l'auteur de sa propre dupe.


Nous en arrivons à la conclusion que les personnages de l'ange et du démon deviennent des personnifications de la lutte du bien et du mal; leur apparition souligne les conflits extérieurs mais aussi intérieurs des protagonistes. L'ange et le démon deviennent les doubles des personnages qu'ils habitent et apparaissent précisément dans les moments de doutes et de crises. Et au delà du roman la thématique ange et démon transcende la structure Gidienne pour apparaître chez le lecteur "actif" comme une manifestation aiguë de la lutte du bien et du mal qui rythme notre quotidien sans pour autant qu'on lui accorde un place majeur dans un monde où morale et liberté ne sont plus que des notions floues. 




Ruddy LIMA EVORA

L'ange et le diable, une seule et même personne?

André Gide, fut élever dans une famille avec de très forte traditions religieuses et très stricte moralement. Pendant son enfance et son adolescence il sera accablé par la sévérité ainsi que par les contraintes. Cette éducation religieuse a fortement influencé ses œuvres, notamment Les Faux-Monnayeurs, dans laquelle on retrouve une interrogation permanente de Gide sur le bien-fondé des interdits religieux. Dans le Journal des Faux-Monnayeurs, Gide écrit, que « sujet central du lire » pourrait être « le traité de la non existence du diable ». En effet, dans Les Faux-Monnayeurs, on a l’apparition récurrente de l’ange et la présence permanente du démon. On comprend donc, que derrière ces figures se cachent une signification particulière. Ici, il s’agira de répondre à la question : Comment le thème du diable et de l’ange apparait-il dans l’œuvre d’André Gide ? En premier lieu, nous verrons la présence de l’ange dans les Faux-Monnayeurs ainsi que sa signification, ensuite celle du démon dans les Faux-Monnayeurs et le Journal des Faux-Monnayeurs, et enfin la symbolique de ces figures.

Pour commencer, dans Les Faux-Monnayeurs on a la présence de la figure de l’ange.
            En effet, l’ange n’est visible que par certains personnages. Bronja, la fille de Sophroniska et Bernard sont les seuls qui sont capables de les voir. Tout d’abord, Bronja dit qu’elle voit des anges, et elle les cherche. Elle essaye d’emmener Boris dans son monde, qui essaye désespérément de voir les anges, mais n’y parvient pas. On comprend que comme ils cherchent et voient les anges, Boris et Bronja sont les modèles de la pureté et de l’innocence. Aussi, Bronja peut être considéré comme l’ange gardien de Boris. En effet, c’est elle qui lui permet de rester lucide, de ne pas dériver. Elle est tout son monde, elle le guide, elle est son ange. Or, ces deux personnages ne vivront pas longtemps car pendant que Boris sera à la pension Vedel-Azaïs à Paris, celui-ci va apprendre la mort de Bronja, qui est « maintenant avec les anges ». C’est quelques jours plus tard que Boris dans le désespoir de la mort de son amie, ainsi que de la haine de la vie qu’il mène dans la pension va emprunter le mauvais chemin et intégrer « La Confrérie des hommes forts », qui va le mener à sa mort.
            Ensuite, le personnage de Bernard est aussi l’un des rare « privilégié » qui peut voir la figure de l’ange. En effet, lorsque celui-ci obtient son baccalauréat, il n’a personne avec qui partager sa joie. De ce fait, il décide de s’asseoir dans le Jardin du Luxembourg et il commence à réfléchir sur ses différentes perspectives d’avenir. De ce fait, le jardin prend une dimension symbolique. Ce n’est pas seulement un endroit de promenade, mais ici il représente l’épreuve existentielle de Bernard. C’est aussi dans le Jardin du Luxembourg que l’ange va apparaitre pour la première fois à Bernard. Ainsi, il prend une dimension onirique et merveilleuse. Gide disait même dans le Journal des Faux-Monnayeurs que le Jardin du Luxembourg « doit rester un lieu aussi mythique que le foret des Ardennes dans les féeries de Shakespeare ». Là, l’ange va se présenter à Bernard, et ils vont se promener ensemble jusqu’à arriver dans un endroit où l’ange va pousser Bernard à s’engager, mais celui-ci refusera. Enfin, le soir quand Bernard retourne à la pension, cette fois-ci il n’est pas tenter de passer par la chambre de Sarah comme il le fait généralement chaque soir depuis le banquet des Argonautes. C’est comme si le démon après la rencontre de l’ange avec Bernard n’avait plus aucun effet sur lui. Arrivé dans sa chambre, Bernard va se battre avec l’ange, mais il semblerait que c’est plus une bataille intérieure car le petit Boris qui assiste à la scène ne voit pas l’ange. Le lendemain, après cette bataille avec l’ange, on assiste à la Renaissance de Bernard, comme si après sa bataille avec l’ange, il avait compris le sens de sa vie, et son rôle dans le monde.
            Enfin, même s’il ne voit pas les anges, Edouard peut être considéré comme un ange gardien pour certains dans la mesure où ils les aident à sortir de leur situation ou de l’améliorer. En effet, c’est lui qui prend en charge Laura jusqu’à ce que celle-ci retourne avec Douviers, c’est lui qui permet à Bernard d’avoir un travail, de voyager, et donc de se découvrir, aussi il propose à Olivier de le recueillir après sa décision de quitter Passavant et il le sauve lorsqu’il essaye de se tuer. Or, on peut nuancer car on sait que Edouard est un personnage ambiguë dans son attitude, et que tout ce qui l’entoure n’est qu’un simple sujet pour son roman. On pourrait donc se demander si derrière toutes ces bonnes actions, il ne se cache juste-il pas un moyen d’avoir de quoi écrire pour son roman ?

De plus le critique Benjamin Crémieux qualifie Les Faux-Monnayeurs de « roman diabolique où le Ciel et l’Enfer luttent sans arrêt ». Le roman peut être qualifié de démoniaque, car la figure du diable parcourt toute l’œuvre.
En effet, le diable peut être vu comme un personnage. Il apparait dès le début du roman, quand il empêche Bernard de réviser son bac « La famille respectait sa solitude ; le démon pas ». C’est encore le diable qui pousse Vincent à jouer la somme d’argent qu’il réservait pour Laura après l’avoir mise enceinte « De quel démon alors avait-il écouté le conseil ? ». Ici, on peut assimiler le démon à Passavant, car c’est lui qui conduit Vincent à jouer son argent, et c’est lui qui l’emmène au salon de jeu. Aussi, le personnage de Lady Griffith, est une figure du diable. En effet, elle influence profondément Vincent, et cela de manière négative. C’est elle qui va le pousser à s’éloigner de Laura, jusqu’à l’abandonner « le diable amusé le regarde glisser sans bruit la petite clé dans la serrure » : Vincent entre dans la maison de Lilian. De plus, ce sont les « démons de l’enfer » qui habitent Olivier après avoir lu la lettre que Bernard lui écrit de Saas-Fée. En effet, celui-ci est jaloux que Bernard et Edouard soient ensemble, et surtout qu’ils dorment dans la même chambre. Olivier amoureux d’Edouard, est animé par le démon de la jalousie. C’est aussi le diable qui « souffle » à Edouard l’idée de mettre le petit Boris dans la pension Vedel-Azaïs, ce lieu qui va entrainer sa perte et dans lequel il mourra. De plus, Gide dit dans le Journal des Faux-Monnayeurs que « Vincent se laisse lentement pénétrer par l’esprit diabolique » (p70 ; Deuxième cahier). En effet, dans la lettre d’Alexandre Vedel à son frère Armand, celui-ci dit avoir trouver Vincent et qu’il « se croit le diable lui-même » après avoir tué Lilian. A partir de ces analyses, on comprend que le diable est celui qui pousse les personnages au vice, tel que l’amour, l’argent, la jalousie, le crime etc. De ce fait, les personnages ne sont plus responsables de leurs fautes.
Ensuite, le personnage du diable est un moyen pour André Gide de faire une réflexion sur le Mal. En effet, la réflexion sur le diable est à la base du roman comme on l’apprend dans l’appendice du Journal de Faux-Monnayeurs intitulé « L’identification au démon ». Il y dit « Tandis que l’on ne peut servir Dieu qu’en croyant à lui, le diable lui, n’a pas besoin qu’on croie en lui pour le servir. Au contraire, on ne le sert jamais si bien qu’en l’ignorant ». Comme on le voit, en lisant le Journal des Faux-Monnayeurs Gide pose le diable comme une figure essentielle de son livre « J’en voudrais un (le diable) qui circulerait incognito à travers tout le livre et dont la réalité s’affirmerait d’autant plus qu’on croirait moins en lui. C’est là le propre du diable dont le motif d’introduction est « Pourquoi me craindrait-tu ? Tu sais bien que je n’existe pas » ». Cette idée est illustrée par le personnage de Vincent « La culture positive de Vincent le retenait de croire à surnaturel ; ce qui donnait au démon de grands avantages. ». Le personnage de La Pérouse quant à lui, pense que le diable et Dieu sont les mêmes personnes « Le diable et le Bon Dieu ne font qu’un » comme il le dit lui-même. On a l’impression que « Dieu est mort » comme le disait Nietzche. Les personnages sont perdus, ils ne savent plus où aller, ils n’ont plus aucunes valeurs morales et c’est pour cela que c’est plus facile pour le diable de les influencer.
Enfin, même si le diable traverse le roman comme un personnage, on se rend compte que le mal est intérieur. En effet, le diable est cette force qui nous pousse à agir sans que l’on se rende compte de nos motivations profonde. On comprend donc que le diable est en quelque sorte notre inconscient. En effet, le comportement d’Edouard illustre cette définition. Derrière ses bonnes intentions qui sont d’aider Laura, ainsi que de ramener à La Pérouse son petit-fils, se cachent peut-être des motifs moins bons qu’il n’y parait. « Derrière les plus beaux motifs, souvent se cachent un diable habile » comme le dit le narrateur. Aussi, Edouard raconte dans son Journal, le suicide du jeune Boris d’une manière totalement détaché. Il donne une image totalement déshumanisée de lui-même car le suicide de Boris ne l’émeut pas alors que celui-ci semblait bienveillant et protecteur avec Boris à Saas-Fée. Comme l’a dit Laura « Son être se défait et se refait sans cesse (…) C’est Protée ». Peut-on comprendre qu’Edouard serait à la fois le Bien et le Mal, l’ange et le diable ? C’est un personnage ambiguë et difficile à comprendre dans son attitude.


Enfin, on peut se demander quelle est l’intérêt pour André Gide de mettre dans son œuvre la figure du diable et de l’ange.
 En effet, l’ange et le diable permettent une réflexion sur la morale, la nature humaine ainsi que le Bien et le Mal. Tout d’abord, la présence du démon et de l’ange est une référence directe à la religion. En effet, en introduisant ces deux figures dans son œuvre, André Gide appelle à une réflexion sur la religion ainsi que ses bien-fondés. La religion nous impose des règles strictes à suivre, ainsi qu’un comportement moral. Elle nous dit de toujours aider son prochain, de faire passer l’intérêt générale au lieu de l’intérêt personnelle. Elle nous impose des valeurs. Or ce sont c’est en suivant ses valeurs sans les comprendre, en suivant le troupeau que l’on court à notre perte. C’est ce que Gide montre dans son œuvre. Les personnages sont tellement dans la conduite morale, dans le paraitre, et l’hypocrisie qu’il est facile pour le diable de s’infiltrer et de les influencer. C’est ce que Gide dénonce dans son roman avec le diable qui domine les personnages.
 De plus, comme nous l’avons vue, certains personnages sont la figure même du diable tel que Passavant et Lilian. Ceci en dit long sur la nature de l’homme. On comprend que nous sommes par nature des êtres mauvais, et que ce n’est pas la religion, la morale qui va nous sauver de notre condition. Or, c’est pour cela que l’on a la présence de l’ange. Il est celui qui éclaire les personnages, et les mène sur le droit chemin comme c’est le cas pour Bernard. Enfin, le diable et l’ange incarne le Mal et le Bien, cette lutte intérieure qui s’opère en chaque homme



Pour conclure, on peut dire que le thème de l’ange et du diable est très récurrent dans l’œuvre, en particulier celui du diable. En effet, le diable domine l’œuvre ainsi que les personnages, et les deux figures apparaissent quand les personnages sont dans des situations où ils ont un choix important à faire pour leur vie. L’ange et le démon deviennent des doubles des personnages qu’ils habitent.