Une sacrée tragédie !
Le sacré est ce qui
appartient au domaine séparé, intangible et inviolable du religieux et qui doit
inspirer crainte et respect. La tragédie a une origine sacrée. Elle naît au Ve
siècle av. J.-C. dans la Grèce antique. Des représentations théâtrales étaient
données lors des fêtes dédiées à Dionysos. Il est le
dieu de la marge et de la transgression, le dieu d’un ancien et lointain
rapport immédiat et parfois violent à la nature. Il est tout de même le dieu
central et indispensable du renouveau, de la joie et de la vie, de l'ouverture
à l'autre, qui va contre la tendance de l'homme et de la cité à se replier sur
les certitudes de leur maîtrise et de leur identité autochtone. Les Dionysies (fêtes
en l’honneur du dieu Dionysos) donnaient lieu à de nombreux préparatifs pour la
préparation du concours, mais aussi les préparatifs destinés à s'assurer de la
présence du dieu. Le lien entre le dieu et les représentations théâtrales est
donc clairement établi. Les
tragédies grecques étaient alors de véritables
cérémonies, à la fois religieuses et civiques, et tous les citoyens y
assistaient gratuitement. A travers l’œuvre théâtrale tragique de Sophocle, Œdipe
Roi et l’adaptation cinématographique du cinéaste italien Pier Paolo
Pasolini, basée sur cette même œuvre, nous allons nous demander si la dimension
sacrée est-elle indissociable de la religion ? Dans un premier temps nous
allons étudier le ressort tragique exercé par la crainte des dieux dans les œuvres
et ensuite comment le sacré est-il dissocié de la religion chez Pasolini.
La crainte des dieux pousse à la tragédie, car l’homme leur fait
confiance aveuglement et sa confiance
est sans mesures. Dans l’œuvre de Sophocle, Tirésias qui détient la vérité s’abstient
de la révéler, dans un premier temps car il pense que les dieux n’ont pas
besoins de son intermédiaire pour dévoiler leur volonté en temps et en heure. Il
prend conscience de son rôle qui n’est que d’être un simple porte parole car il
sait que Oedipe, maudit par les dieux, ne l’écoutera pas ni le croira pas. La
volonté des deux finira par s’accomplir lorsqu’ils l’auront souhaité, avec ou
sans les révélations de Tirésias.
Le proscenium est le lieu de la profanation et de l’hybris, et aussi
celui de la Némésis (qui représente la colère des Dieux). C’est l’espace dévolu
aux acteurs ou ils génèrent les péripéties qui font avancer
l'action en agissant et en parlant. Œdipe, le premier de tous les personnages
mais aussi Jocaste qui refusent de s'abstenir et d'attendre la volonté des
dieux et se croient libres de leurs paroles et de leurs actions sans chercher à
les contrôler et les modérer. Les relations entre les personnages marquent
leurs différences à l’égard de l'espace du sacré. Œdipe montre souvent des accès
de violence et de colère, comme lors de l’affrontement avec Tirésias ou il l’offensera
et aussi lorsque qu’il interroge le vieux berger sur l’enfant abandonné. Sa colère
prend une forme d’hybris. La colère des Dieux (Némésis) frappe le proscenium de
façon spectaculaire, les personnages qui se sont laissé aller à l'hybris comme Œdipe
et Jocaste.
Chez Pier Paolo Pasolini, la religion est dissociée du sacré. Car tout d’abord
le réalisateur fait le choix de supprimer le chœur qui sera remplacé par des
chants populaires roumains. Pasolini fait le chois de cette langue car de vue,
on ne remarque pas son incompréhensibilité. Il supprime le sacré qu’inspire l’oracle
de Delphes en lui retirant son temple car sans lui, la pythie n’est pas mise en
valeur. Elle se gave de riz et émet un rire discordant. Quant à lui Tirésias ne
se réclame plus comme prêtre d’apollon mais il se défini plutôt comme un
mendiant errant et aveugle. Sa dimension, non d’oracle d’apollon mais juste de
joueur de flûte fait envie a Oedipe. Car par la suite, guidé par Angelo (« messager
d’apollon rebaptise »), la dimension sacrée persiste malgré le faite qu’il
perde sa dimension religieuse. Il jouera le rôle d’un guide pour Oedipe.
A travers son œuvre, Pasolini critique la civilisation moderne et exprime
un manque du temps mythique. Il va le réinventer dans Oedipe roi. Selon la
sensibilité lyrique et l’imagination de Pier Paolo Pasolini (poète /cinéaste), il
faudrait un équivalent des temps mythiques, une préhistoire où pourrait se
donner à voir et à sentir la présence du sacré dans le monde qui nous entoure. Les
choix de masques et de costumes peuvent nous faire penser aux différents
mélanges de cultures primitives empruntées par Pasolini, par exemple, celle des
Aztèques précolombiens, celle d’Océanie
et d’Afrique.
Nova SAMB
C'est un devoir argumenté, qui présente une analyse des deux oeuvres. Mais il aurait fallu toutefois confronter davantage les deux oeuvres au sein des paragraphes.
RépondreSupprimerAttention aux quelques erreurs d'orthographe.
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