vendredi 16 décembre 2016

sacré et religion, vraiment indissociable ?

Dans Œdipe Roi de Sophocle et Pasolini, la notion du sacré possède une forte présence. Que ce soit dans les paroles chez Sophocle ou les symboles chez Pasolini. Par définition, le sacré renvoie au lien avec le divin et la religion, il désigne ce qui est mis en dehors de l’ordinaire, ce qui est inaccessible, interdit et peut même devenir un objet de dévotion et de peur. Par cette définition, nous constatons alors que le sacré et la religion vont de paire, mais chez Sophocle et Pasolini, ces deux aspect nous amènent à nous questionner : le sacré est-il indissociable de la religion ?

Premièrement, nous pouvons effectivement affirmer que le sacré, chez Sophocle et Pasolini est indissociable de la religion. Comme la définition le dit, il est le trait d’union entre le divin et la religion. Tout d’abord, le mythe lui même prouve cette indissociabilité : le pouvoir des dieux sur le destin des protagonistes, Œdipe ne peut en effet échapper à son destin, ainsi que Jocaste et Laïos. Chez Sophocle en particulier, le divin est fortement présent. Dans le prologue, le prêtre de Zeus vient demander de l’aide à Œdipe, afin de chasser la peste qui affecte la cité. Effectivement, la religion revient souvent dans son discours : « Tout le reste du peuple, pieusement paré, est à genoux, ou sur nos places, ou devant les deux temples de Pallas, ou encore près de la cendre prophétique d’Isménos. », il compare la Peste à « une déesse porte-torche, déesse affreuse entre toutes », c’est donc un objet de peur, s’apparentant alors au sacré. Œdipe, dans le discours du prêtre encore, est considéré comme « le premier de tous les mortels », comme un prophète qui a reçut « l’aide d’un dieu » afin de résoudre l’énigme de la Sphinge. N’oublions pas non plus le Chœur, qui fait sans cesse des rappels aux Dieu : « Ô douce parole de Zeus », « Dieu qu’on invoque avec des cri aigu, dieu de Délos, dieu guérisseur. », « immortelle Athéna ». Les exemples sont ici bien nombreux. Les hommes ici, dépendent à l’évidence des dieux, et ceux-ci leur font également peur par leur puissance divine. Chez Pasolini, nous remarquons l’indissociabilité du sacré et de la religion premièrement lorsque qu’Œdipe s’en va connaître son destin en allant voir la Pythie au temple d’Apollon, celle-ci le lui donne, tombant dans un état de transe, comme possédée par le dieu. Ses oracles sont généralement incompréhensibles pour le commun des mortels. Dans le film, son rire strident et apeurant nous rappel effectivement cette idée d’objet de peur qu’est le sacré. Rappelons-nous également que c’est le dieu Apollon qui lance la malédiction sur les Labdacides. Le sacré dans ces deux œuvres est en l’occurrence indissociable de la religion, et pourtant nous pouvons remarquer, comme l’a dit Coumba, « une désacralisation du mythe » chez Pasolini par l’absence du Chœur qui se trouve chez Sophocle.

Dans un second temps, nous pouvons alors affirmer que le sacré dans Œdipe Roi est dissociable de la religion. En effet, Pasolini supprime le chœur dans son film, le remplaçant par des chants, danses et groupes de personnes. Œdipe perd également toute sa sagesse, remplacée par la violence : il ne résout aucune énigme, mais tue le Sphinx, et pourtant se proclame devin, et insulte même Tirésias lors de sa venue à Thèbes. Cette agression apparaît également chez Sophocle, Œdipe traite Tirésias de « faux prophète », il se valorise également, « c’est moi, moi seul, qui lui ferme la bouche, ans rien connaître des présages, par ma seule présence d’esprit. ». Il commet ici l’hybris, ou le péché de démesure qui consiste à se croire l’égal des dieux. Pasolini insiste sur cette dissociabilité du religieux et du sacré en désacralisant l’oracle de Delphe, elle n’est pas mise en valeur : au lieu de mâcher des feuilles de laurier, elle se gave de riz. La Sphinge n’est plus du tout ce qu’elle est dans la légende : c’est un simple homme, portant un grand masque : le sacré est ici supprimé. Tirésias, chez Pasolini, se définit lui-même comme un mendiant aveugle, et prend ainsi une dimension humaine de joueur de flûte. Œdipe devient d’ailleurs par la suite une substitution de Tirésias (dans l’épilogue), alors qu’il retourne dans l’Italie moderne, accompagné par Angelo, censé être le messager. Dans le film, La religion reste alors que peu présente, alors que le sacré garde une place plutôt importante. Sophocle reste lui fidèle à la religion, même si nous retrouvons quelque dissociabilité de sacré et de la religion.

            Pour conclure, chez Sophocle et Pasolini, le sacré et la religion ne sont pas indissociables, contrairement à ce que nous pourrions croire à première vue. Cette dissociabilité paraît néanmoins plus frappante chez Pasolini que chez Sophocle, qui garde une certaine fidélité au lien qui unit ces deux aspects.


1 commentaire:

  1. C'est un devoir bien structuré et bien argumenté, avec des références précises aux deux oeuvres. Il aurait fallu toutefois analyser davantage les deux oeuvres, approfondir.

    Poursuivez ainsi !!! Bravo !

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