lundi 3 octobre 2016

Comment le temps joue il un rôle dans la destinée d'Oedipe ?

La tragédie de Sophocle, “Oedipe roi”, qui a également été ré interprétée par Pier Paolo Pasolini, nous présente de manière cathartique un personnage, Oedipe, dont l’histoire tragique est régie par le temps.
Le mot temps peut avoir deux interprétations différentes : il peut signifier non seulement l’unité quantifiable (Secondes, minutes, heures, …) mais également la météo.
Dans un film le temps est crucial, et nous allons donc étudier le rôle de ces deux définitions du temps, dans le mythe originel de Sophocle ainsi que dans sa ré interprétation par Pasolini.

Comment le temps joue il un rôle dans la destinée d’Oedipe ?



Tout d’abord, le temps (l’unité), dans la tragédie d’Oedipe, que ce soit dans le livre comme dans le film, le temps est le fautif de la précipitation de sa malediction. 
En effet, nous savons, dans l’histoire de la tragédie d’Oedipe (même si ce passage n’est pas mentionné dans le livre et que la tragédie commence dès son règne au trône de Thèbes) que ses parents, Laios et Jocaste, après avoir consulté l’oracle et entendu sa destinée, l’abandonnent en le pendant par les pieds. Seulement, nous savons également que c’est justement cet acte qui va déclencher la malédiction. Dans le film, la ré interprétation de ce moment ne change rien au rôle du temps dans la tragédie d’Oedipe : ce dernier est attrapé, serré par les pieds par son père dès les 10 premières minutes de l’épilogue, ce qui déclenche assez rapidement la destinée malheureuse de ce dernier et l’entrainent la tête la première dans la tragédie, qui durera par la suite 1h30 environ. La réaction d’Oedipe, une fois qu’il est adulte et a été voir la pythie pour l’interroger sur sa propre destinée n’arrange pas les choses : ce dernier s’enfuit de sa “famille d’accueil”, et contribue ainsi lui aussi au précipitamment de sa propre destinée, car son chemin du hasard va le pousser à commettre exactement les actes prédits : tuer son père et faire l’amour à sa mère. Un autre élément qui contribue, chez Sophocle à la rapidité de la précipitation de la destinée d'Oedipe est la règle des trois unités : en effet, l'action dans ce livre suis la règle antique de "une action un lieu un jour" (L'action se passe à Thèbes, raconte la résolution de l'énigme de la vie d'Oedipe, et se passe en une action). 
Mais le temps, dans cette tragédie, ne fait pas que la précipiter : nous pourrions également dire que d’un autre côté, il la retarde. 
En effet, tout d’abord il y a un élément qui vient confirmer la lenteur de la tragédie dans ce film, mais également dans le livre. Dans le mythe originel, tout comme dans le film ré adapté, Oedipe, lorsqu’il règne sur Thèbes, cherche à délivrer son peuple de sa souffrance (le livre de Sophocle commence d’ailleurs à ce moment, lorsque le peuple souffre de la peste, et Pasolini réadapte également de moment en filmant, avec des plans de près très dérangeants pour son spectateur, des corps lacérés par la peste). Pour cela, lui disent les oracles, il faut retrouver coupable du meurtre de Laios, qu’il ignore être son père ainsi que celui qu’il a tué. Au fur et à mesure de l’histoire, Tiresias et des oracles à tour de rôle vont essayer de lui faire comprendre qu’il est le coupable qu’il cherche, mais Oedipe refuse de voir la vérité (C’est d’ailleurs pour cela qu’une fois qu’il va savoir que la prophétie disait vrai qu’il va se crever les yeux, afin de ne plus voir la vérité en face). Ce refus empêche la tragédie de se conclure rapidement, et contribue donc également à la lenteur de la résolution de l’intrigue principale.Egalement, nous pouvons constater que le film de Pasolini est très lent. Ce dernier dure 1h30 contre seulement 53 pages chez Sophocle, et vient s’appuyer à cette idée de lenteur du temps. 
Le temps est donc à la fois rapide dans le sens où la tragédie débute et est entrainée très rapidement, mais également lent dans le sens où il retarde le moment de la résolution de l’énigme principale. 





Seulement, le mot “temps” peut être également interprété dans un autre sens : on peut aussi voir ce dernier comme un synonyme du mot “météo”. La météo n’est pas le seul élément important dans la mise en place de la tragédie, les décors ainsi que les costumes travaillent de paire avec elle. 
Contrairement à Sophocle, Pasolini ne s’est pas du tout cantonné au paysage de la grèce, et glisse dans ses décors, costumes et musiques en fond sonores de très nombreuses et variées références. Les décors sont de toutes provenances : les décors, pour la plupart filmés dans les déserts marocains ne sont pas non plus sans rappeler les paysages de l’Afrique primitive, comme par exemple Delphes, où la Pythie, au lieu de se trouver dans un temple comme chez Sophocle, est sous un arbre qui rappelle le fameux “arbre à palabre” en Afrique, qui sert de lieu de jugement. Ce ne sont pas les seules références africaines : les masques de la Pythie ainsi que du Sphynx, avec leurs coquillages faisant penser à des masques africains. Toujours dans le thème des masques, il y a également le visage de Jocaste à l’aspect blanchâtre qui rappelle certains masques de théâtre, notamment ceux de la commedia dell’arte, aux traits déformés par la joie ou la tristesse.
Quant aux costumes, il y a également de nombreuses références qui y sont faites. Dans le prologue de Pasolini, partie rajoutée au texte original du mythe de Sophocle, nous y retrouvons son père habillé en de vieux costumes italiens, ainsi que sa mère dont les habits sont inspirés de vieilles photos de famille. Ce prologue est mis en contraste avec l’histoire qui suit, où nous retrouvons encore une fois des costumes africains, certains inspirés de costumes polynésiens (Notamment dans l’épisode chez la Pythie).
La plupart de ces costumes, de nature assez primitive ainsi que les décors arides et secs (qui font référence à la solitude intérieure d’Oedipe) pourraient faire référence non seulement à la sauvagerie d’Oedipe (sur laquelle Pasolini met beaucoup plus l’accent que chez Sophocle, où ce dernier est plus réfléchi), mais également au vide, au désert qui se trouve en Oedipe (Comme lui dit le sphinx dans le film de Pasolini, “L’abime dans lequel tu veux me pousser est en toi”).
Les décors ainsi que les costumes ont donc pour rôle, dans cette tragédie, d’installer l’instabilité du personnage d’Oedipe, son aridité en montrant au spectateur des paysages arides de l’Afrique, mais également d’installer la tragédie dans ces déserts secs, où aucune plante de peut germer (parallélisme avec la vie d’Oedipe : Il ne pourra pas "germer" dans le désert de sa vie).

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