jeudi 5 janvier 2017

D'Oedipe

-Un privilège de roi-
-Un privilège de roi-
Une compagnie de luxe thébaine a sorti la semaine dernière une publicité dessinée par l'artiste Kirisam pour vendre ses services qui devraient d'après celle-ci faire sensation. Voilà que l'on propose aux habitants de Thèbes même des "soins royaux". L'affiche publicitaire qui est supposée vendre ces services n'a cessée de faire parler d'elle mais pas seulement positivement. "D'Oedipe", placardée sur les murs de Thèbes voile la cité de souvenirs sombres.

"Immersion totale et exclusive dans la vie royale". Pour mettre en avant le réalisme de la séance que propose la compagnie, celle-ci a laissé carte libre à Kirisam, hyperréaliste hors pair. Si l'on ne peut remettre en question le réalisme de son œuvre, le choix du roi Œdipe laisse à désirer. Kirisam a en effet fait le choix audacieux de représenter la vie de l'ancien roi de la cité de Thèbes. Il dit avec un grain d'ironie avoir voulu percer la vision de ce roi singulier. 

Cette publicité s'est naturellement faite remarquer. Les avis divergent. Certains voient dans sa réalisation l'influence marquante de Malevitch avec son Carré noir sur font blanc et associent parfois même le projet de Kirisam à celui de peindre le vent du peintre et graveur français Zao Wou Ki. D'autres, plus sceptiques se demandent si cela décrit réellement une nouvelle formule de la compagnie. Le "post-luxe" serait une épuration totale que le noir représenterait fort bien. Près des affiches placardés les esprits s'échauffent. Alors que certains accusent la compagnie de se moquer de ses clients en voulant leur faire payer à prix d'or ce qu'une dague à cinq sous ferait très bien, d'autres assurent que ce que l'affiche laisse voir n'est pas forcément la vérité. Plus loin, un public plus âgé ayant connu Œdipe au pouvoir se déclare être outré par la publicité qu'il considère insultante. L'histoire d’Oedipe, d'après eux, devrait être prise avec gravité et non pas être exposée aux feux des projecteurs au risque d'inciter la jeunesse à suivre son exemple. Une cliente fidèle à la compagnie s'avoue "choquée et déçue" par cette affiche qui assombrit littéralement les couleurs de la ville mais nous confie avoir déjà essayé les nouveaux services annoncés. 

La compagnie a néanmoins assumé sa décision qui a permis qu'elle se fasse connaître par les cités voisines. Mais elle a dû récemment quitter Thèbes à cause de l'association des aèdes et devins aveugles qui réclamaient une part des bénéfices qu'apportait la publicité qui portait atteinte à leur propriété, l'aveuglement, et menaçait leur monopole. Mal vue par les influents devins, le magasin installé par la compagnie perdait chaque semaine des clients et s'est donc vu forcé de s'installer à Corinthe qui l'a reçue bras ouverts. Certaines chaînes de magasins voient d'un mauvais œil ce fait divers, fatigués par les complications qu'accompagnent chaque tentative d'implantation ont cessé de poursuivre leurs efforts. Désertée, Thèbes est vraisemblablement maudite.

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