samedi 4 février 2017

Le portrait chinois des Faux-Monnayeurs.


Si Les Faux-Monnayeurs était un tableau, ce serait le Requiem de Steve Walker. Ce tableau représente trois hommes assis dans une église. Tous trois sont liés par leurs bras. En effet, en partant de la droite à la gauche, on voit que le premier homme a posé son bras autour du second, et que le second a fait de même avec le troisième.

Tout d’abord, ces trois hommes m’ont directement fait penser à Bernard Profitendieu, Olivier Molinier et Edouard qui sont les trois personnages principaux du roman d’André Gide. Le geste de la main sur le bras souligne une certaine ambiguïté : on ne sait pas si c’est un geste de réconfort ou un geste intime entre les personnages. Cela fait écho avec le thème de l’amitié confuse et ambigüe qui est au centre des Faux Monnayeurs.  En effet, l’amitié entre Bernard et Olivier est ambiguë dès le premier chapitre du roman avec la scène dans le lit d’Olivier : les deux jeunes hommes sont proches mais ils ne se passent rien entre eux. Cependant le lecteur ne peut s’empêcher de croire qu’il va se passer quelque chose jusqu’à la fin du chapitre.  André             Gide fait exprès de donner une description de la scène qui laisse penser à  un prélude à une relation sexuelle pour troubler le lecteur et créer une certaine confusion.

Ensuite, on pourrait noter un autre point commun entre les deux œuvres : la religion. Dans le tableau de Steve Walker, comme son titre l’indique « Requiem », met en scène les trois hommes, réunis pour réciter une prière pour les morts. Cet aspect religieux apparaît également dans l’œuvre d’André Gide, dans la famille des Vedel-Azaïs. En effet, le père de famille est un prêtre qui dirige une pension dans le but d’accueillir de jeunes enfants pour les éduquer. Cependant, la pension Vedel-Azaïs est décrite par Edouard comme étant un lieu austère et froid surmonté par l’excessive sincérité et dévotion du Père Azaïs.

De ce fait on pourrait comprendre, grâce à ce tableau, qu’André Gide fait une critique de la religion en remettant en cause ses tabous : il franchit ses limites et met en avant le thème de l’homosexualité, thème primordial dans son œuvre. En effet, si on revient à l’ambiguïté entre la posture des hommes dans le tableau et entre le lieu de culte dans lequel ils sont mis en scène, on eut dire que cela témoigne de la révolte des deux artistes contre les mœurs strictes de l’Eglise. De plus, comme André Gide, Steve Walker est également homosexuelle. Cependant, aucune certitude n’est donnée sur l’homosexualité des personnages dans le roman de Gide. 

Pour finir,  on remarque sur l’œuvre de Steve Walker qu’un des trois hommes se détache des deux autres et leur tourne légèrement le dos. Cela rappelle la deuxième partie du roman de Gide, lorsqu’Edouard, Laura et Bernard sont à Saas-Fée en Suisse, et que Bernard écrit une lettre à Olivier dans laquelle il raconte son aventure. Or ce que Bernard ignore, c’est que cette lettre va blesser Olivier et va le pousser à se rapprocher encore plus de Passavant. L’homme qui s’éloigne légèrement des autres peut être Olivier qui se sent rejeter à cause du rapprochement entre Bernard et Edouard en vers qui il ressent une forte jalousie.

Ornella BUTARE. 

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