mardi 11 avril 2017

Une Présence Abondante




Les Faux Monnayeurs donnent à son lecteur une sorte de profusion de personnage important. Dans le Journal des Faux Monnayeurs, Gide dit vouloir que tous ses personnages chacun à leur tour, puissent occuper le devant de la scène du roman. Ainsi Gide nous propose une ribambelle de personnage tous liés, les uns avec les autres. Il prétend entendre ses personnages mais ne pas pouvoir se les représenter. Du coup, les détails physiques sont étonnamment absents de leurs portraits et ils ne livrent de leur passé que des bribes d'informations. Qu'apporte cette profusion de personnages au roman, et quelle justification André Gide en donne-t-il dans son Journal ?

Le roman, propose divers personnage, Gide indique que ses personnages se sont imposés à lui et qu’ils vivent à ses dépens. En soit, l’auteur donne vie à ces personnages. C’est donc en chacun d’eux que Gide que va s’imposer la personnalité de Gide, car c’est grâce à son imagination que l’œuvre est nourrit. Il présente ces personnages comme des êtres autonomes, libre de pense et agir par eux même. Les personnages sont comme des projections de l'écrivain, à leurs manières et de par certains de leurs traits, ils représentent une partie de ce à quoi leur créateur a renoncé ou un rêve qu'il ne se réalisera jamais, ils sont ses espoirs déçus.

La présence des personnages, se fait ressentir par cet effet de sonore qu’est leurs voix. A travers la narration, les dialogues ou les conversations rapportées sous plusieurs points de vue, ces personnages font en sorte de faire distinguer leur voix et leur style parmi les autres. Ceux qui se présentent le plus sont les voix de Bernard, Edouard et Olivier. Gide écrit dans son journal «Je sais comment ils pensent; comment ils parlent. Je distingue la plus subtile intonation de leur voix ». Les personnages que nous propose Gide et qui tente de s’affirmer par leur voix peuvent provoquer un sorte d’étourdissement du lecteur qui se retrouve noyer dans tous ces conversations qui ne cesse d’être rapporté de différente façon.  " Pour moi, explique Gide, c'est plutôt le langage que le geste qui renseigne." Et il ajoute "le mauvais romancier construit ses personnages ; il les dirige et les fait parler. Le vrai romancier les écoute et les regarde agir; il les entend parler dès avant que de les connaître et c'est d'après ce qu'il les entend dire qu'il comprend peu à peu qui ils sont." 

Cette méthode restreint le milieu dans lequel Gide va fabriquer ses personnages car ils doivent tous aimé parler, écrire, conversé, échanger. Ils vont appartenir soit à la bourgeoise cultivée soit à l'aristocratie et le roman va ainsi se composer comme une suite d'échanges, de conversations, de réunions entre différents protagonistes. Gide se sert en fait de ces personnages comme des réservoirs d'idées. Chaque personnage va s'exprimer en fonction de son milieu d'origine : le lycée pour Bernard et Olivier, le monde de la littérature pour Edouard et Passavant, le monde des avocats pour Molinier et Profitendieu, la biologie pour Vincent, le libertinage pour Lilian. 

L'une des particularités du roman gidien réside dans le changement de statut des personnages qui tantôt jouent un rôle de premier plan et tantôt devient des figurants; Le romancier se vante de faire attendre ses personnages avant de les amener au centre des regards et en multipliant les scènes du roman, il augmente d'autant le passage de ces principaux protagonistes à l'arrière-plan. De plus, il s'attache à décrire avec précision les personnages qui ne vont jouer aucun rôle et à mettre en lumière certains détails de leur portait physique notamment comme Dhurmer dont on apprend, dès le premier chapitre que c'est un petit barbu à pince- nez, sensiblement plus âgé que les lycéens. On ne saura rien des détails physiques qui nous permettraient d'imaginer Bernard, Olivier ou Laura.

Malgré le désir de Gide de faire de ces personnages des personnes solitaire, il s’oblige à les regrouper de différente façon : soit par des liens familiaux qui les regroupe par personnage issue de la même famille. On a donc les Molinier avec l’oncle Edouard, les Profitendieu, les Vedel-Azaïs, les Passavant ; soit par les liens d’amitié amoureuse comme Edouard/Laura et Olivier/Bernard ou Passavant/Lady Griffith. Chaque élément de ces couples va ensuite former un nouveau couple avec un personnage associé : Laura avec Vincent, le frère d'Olivier et ensuite avec Bernard; Edouard avec Olivier et ensuite avec Bernard. Passavant va échanger Lilian contre Olivier avec l'appui du frère de ce dernier alors que Lilian va avoir une aventure avec ce même frère Vincent. Au niveau générationnel, les parents s'opposent assez singulièrement à leurs enfants car le dessein du romancier est notamment de montrer comment, après avoir critiqué le mode de vie de leurs parents, les enfants ont tendance à refaire la même chose. Certains personnages n'interviennent seulement pour séduire ou détourner un personnage d'un avenir plus ou moins tracé comme Lilian, Strouvilhou et Ghéridanisol.

Gide a organisé son système des personnages en mettent en place une conception romantique qui consistait selon lui à " opposer un personnage à un autre ou de faire des pendants.". Néanmoins, on peut remarquer les personnages issus de la même tranche d'âge le plus souvent représentent différentes possibilités de réactions face à l'ordre établi. On trouve ainsi deux romanciers qui ont des conceptions différentes de la littérature; parmi les enfants d'une même famille, certains s'opposent radicalement et d'autres se ressemblent.



                Pour conclure nous pouvons ainsi dire que la profusion abondante de personnage dans Les Faux Monnayeur apporte une musicalité des voix avec l’affirmation des styles de chacun. Cependant leurs liens complexe, leurs oppositions variées, et leurs ressemblances crée une certaine confusion chez le lecteur. Toute l’originalité ce cette œuvre réside dans cette profusion mais également dans la liberté d’action que donne l’auteur à ces protagonistes.

1 commentaire:

  1. Une analyse rigoureuse et intéressante, bravo ! Il aurait fallu toutefois vous appuyer davantage sur des exemples précis. Poursuivez ainsi !

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