Les Faux-Monnayeurs, d’André Gide est le roman qui
révolutionne le genre romanesque. En effet, Gide met en œuvre une version
inédite, et nouvelle du roman. Il multiplie les intrigues, intègre des
interventions et commentaires sur ses personnages, et il varie les points de vue.
En effet, dans Les Faux-Monnayeurs,
Gide propose une profusion de personnages qui prennent une part importante dans
le roman. Ici, il s’agira de répondre à la question : Qu’apporte la
profusion de personnages dans le roman, et quelle justification André Gide en
donne-t-il dans son Journal ? En premier lieu nous verrons que la
profusion des personnages contribue à la complexité de l’intrigue, ensuite
qu’elle permet à l’histoire de se construire, et enfin que la profusion des
personnages implique la participation du lecteur.
Pour commencer, la profusion des personnages contribue à la
complexité de l’intrigue
En effet, Gide propose une multitude
de personnages dans son roman ce qui entraine une multitude d’intrigues
secondaire qui se tissent autour de l’intrigue principale. Dans Les Faux Monnayeurs, chacun des
personnages est considéré comme narrateur car ils s’expriment, et c’est par le
biais de ces personnages narrateurs que le lecteur connait l’histoire. En effet,
ces personnages que l’on peut qualifier de secondaires, donnent leur point de
vue sur l’action. Par exemple, quand Passavant invite Olivier à venir avec lui
en Corse, on a affaire aux points de vue de Bernard, Edouard, Vincent, et
Pauline la mère des enfants Molinier sur ce voyage. En effet, Gide délègue la
parole autant que possible à différents personnages pour narrer une même
action. Dans le Journal des
Faux-Monnayeurs, il dit que « Le
mauvais romancier construit ses personnages ; il les dirige et les fait
parler. Le vrai romancier les écoute et les regarde agir : il les entend
parler es avant que de les connaitre, et c’est d’après ce qu’il leur entend
dire qu’il comprend peu à eut qui ils sont ». En effet, on comprend
que la profusion des personnages permet à Gide de leur déléguer la parole et que
par ce procédé, il peut prendre du recul sur son œuvre et réfléchir dessus,
ainsi que sur ses personnages.
En effet, dans
son roman André Gide intègre des interventions de sa part, ainsi que des
commentaires sur ses personnages. Ce procédé lui permet de questionner son
œuvre. Il faut comprendre que les personnages se présentent à Gide, ils les
rencontrent au cours de son aventure de l’écriture. Autrement dit les
personnages s’imposent à lui comme il le montre dans Les Faux-Monnayeurs : « Laura, Douviers, La Pérouse, AzaÏs…
que faire avec tous ces gens-là ? Je ne les cherchais point ; c’est
en suivant B et O que je l’ai trouvés sur ma route. Tant pis pour moi ;
désormais, je me dois à eux. ». On comprend que la profusion de
personnages complique l’intrigue du roman. À cause de la multitude de
personnages secondaire qui s’expriment sur l’action et qui racontent chacun
l’histoire selon leur point de vue on a affaire à une intrigue complexe.
De plus, la
profusion de personnages permet à l’histoire de se construire
En effet, c’est par le biais des
personnages que l’histoire se met en place. Ce sont eux qui racontent
l’histoire. Par exemple, en ce qui concerne l’histoire d’amour entre Vincent et
Laura, c’est Olivier le frère de Vincent qui raconte pour la première fois
cette histoire. C’est dans son dialogue avec Bernard, que l’on découvre la
liaison entre les deux personnages que l’on ne connaissait pas encore, et c’est
ainsi qu’ils apparaissent pour la première fois. Ensuite, on apprend plus de
détails sur l’histoire des deux amants dans le dialogue entre Lady Griffith et
le compte de Passavant. Petit à petit, par le biais des autres personnages
(Édouard, Bernard…) qui sont les proches de Laura ou de Vincent, on découvre
leur histoire en entier. En effet, celle-ci n’est jamais directement raconté
par les deux amants. On comprend ainsi que les dialogues des personnages construisent
non seulement l’histoire, mais encore ils construisent les personnages en eux
même. En effet, le fait de laisser les personnages parler, permet au lecteur de
s’identifier à ceux-ci, et de mieux les connaitre : leur personnalité,
point de vue etc. La voix des personnages se fait entendre par des procédés
variés : lettres, dialogues, monologue intérieur, journal, confession…Par
exemple c’est dans le Journal d’Edouard dans lequel celui-ci
pose comme Gide, ses réflexions sur le processus de création, ses idées pour
son roman, que l’on connait certains événements qui
se sont passés en dehors du cadre du Journal, ou bien des informations non
mentionnées. Par exemple, c’est par le journal d’Edouard que l’on apprend que
Bernard est retournée chez sa famille, et que sa mère a quitté le cocon
familial.
Par la profusion de personnages il est difficile de
distinguer les personnages principaux des personnages secondaires tant Gide
veut à chacun donner sa place : « Je
veux attirer tour à tour chacun de mes personnages sur le devant du théâtre et
lui céder un instant la place d’honneur ». (Journal des Faux-Monnayeurs). En
effet, dans Les Faux-Monnayeurs on a affaire à un réseau de relation complexe tissé
entre les cinq grandes familles du livre : Molinier, Profitendieu, Azaïs,
La Pérouse et Passavant. Certains membres de ces familles sont amis, d’autres
amants, ou d’autres se déteste. Gide, considère ses personnages comme des « petite bobines vivantes »
autour desquelles il « enroule les
fils de l’intrigue » comme il le dit dans le Journal des
Faux-Monnayeurs. On comprend alors que les personnages sont pour Gide un moyen
de s’exprimer car celui-ci n’arrive pas à s’exprimer en son propre nom : « Il
m'est certainement plus aisé de faire parler un personnage, que de m'exprimer
en mon nom propre ; et ceci d'autant que le personnage créé diffère de moi
davantage... » (Journal des Faux-Monnayeurs). Ainsi Gide
se sert de ses personnages pour exposer une grande partie de ses idées. Par
exemple, le personnage du vieux La Pérouse lui permet d’introduire des réflexions métaphysiques et littéraires.
Enfin, la profusion de personnage que
nous propose Gide oblige une participation du lecteur.
En
effet, la profusion de personnages que nous propose Gide peut
provoquer une confusion chez le lecteur qui se retrouve noyer dans tous ces
personnages différents. De ce fait, le lecteur se doit de participer à la
construction de l’histoire. Dans ce roman dont l’intrigue est complexe et les
personnages nombreux, le lecteur se doit d’abord de démêler les fils. Mais,
c’est surtout la multiplicité des points de vue qui rend la compréhension des
événements difficiles. Gide disait dans son Journal
des Faux-Monnayeurs : « Je
voudrais que les événements ne fussent jamais raconté directement par l’auteur,
mais plutôt exposés (et plusieurs fois, sous des angles divers) par ceux des
acteurs sur qui ces événements auront eu quelque influence. Je voudrais que
dans le récit qu’ils en feront, ces évènements apparaissent légèrement déformés ;
une sorte d’intérêt vient, pour le lecteur, de ce seul fait qu’il ait à
rétablir. L’histoire requiert sa collaboration pour bien se dessiner. »
Le lecteur collabore
avec l’auteur dans la mesure où c’est à lui de rassembler les pièces du puzzle
pour reconstituer un événements. Ainsi, l’histoire de Laura et Vincent se
recompose lentement : Olivier confie à Bernard qu’il a entendu une femme
pleurer à la porte de son frère Vincent, puis le narrateur nous en révèle
davantage quand on découvre Vincent rejoindre Passavant. Au chapitre 5, c’est
Lilian qui rapport à Passavant ce que Vincent lui a confié de sa liaison avec
Laure. Enfin au chapitre 8 le lecteur découvre la lettre de Laura que relit
Edouard. On comprend que cette tel profusion
exige un lecteur capable de réfléchir. Son roman est difficile, et Gide en a
conscience.
Pour
conclure, on peut dire que Les Faux-Monnayeurs propose une multitude de
personnages. Ces personnages participent à la complication de l’intrigue, ils
permettent à Gide de réfléchir sur son roman ainsi qu’à l’histoire de se
construire. Enfin, ils obligent une participation active du lecteur, c’est à
dire qu’il doit être conscient car comme Gide le dit dans le Journal des
Faux-Monnayeurs : « Je n’écris que pour être relu ». Le roman
est d’une complexité telle qu’il ne peut être apprécié à la première lecture.
C'est un excellent travail, bravo ! De réels progrès, notamment concernant la maîtrise de la lanngue ;)
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