La grande particularité des Faux-Monnayeurs
provient de l’originalité avec laquelle Gide battit son roman. Il fait en effet
rentrer son lecteur dans un monde animé par de multiples personnages, et crée
une ambigüité. Il est alors intéressant de se demander qu’apporte la profusion
des personnages au sein de l’œuvre ?
Tout d’abord nous verrons que cette profusion
de personnage fait toute l’originalité du roman, ensuite nous analyserons le
fait que la profusion des personnages permet l’avancer de l’intrigue du roman.
Dans un premier temps la profusion de
personnage permet d’apporter une grande originalité au roman de Gide. En effet,
il va délibérément composer son roman de façon désordonné. Le lecteur va se
retrouver face à de nombreux retour en arrière (analepses) ou et projection en
avant (prolepse). Cette variation étant justement due à la variation
extrêmement riche des points de vue. La multitude de personnage permet donc d’avoir
un roman ambigu dans lequel on a du mal à se repérer temporellement. Au sein des Faux-Monnayeurs Gide a voulu faire
coexister plusieurs romans au sein de son roman, il dit justement dans le
Journal des Faux-Monnayeurs : « Je voudrais que les événements ne
fussent jamais racontés directement par l’auteur, mais plutôt exposés (et plusieurs
fois sous des angles divers) par ceux des acteurs sur qui ces événements auront
eu quelque influence. » le lecteur accède donc à l’histoire par le biais
de diverses visions qui lui permette de forger son opinion sur chaque
personnage non pas par la voix d’un seul et même narrateur qui influencerai sa
vision de l’histoire. Gide va effectivement refuser les facilités du narrateur
omniscient, il cherche à faire rentrer le lecteur dans l’histoire à l’investir,
et ceci est possible de par les nombreuses informations réceptionnées par le
lecteur qui se doit d’analyser pour comprendre. Il va d’ailleurs exprimer dans son
journal cette volonté de faire participer le lecteur à la vie du roman : « Je
voudrais que, dans le récit qu’ils en feront, ces évènements apparaissent légèrement
déformés ; une sorte d’intérêt vient pour le lecteur, de ce seul fait qu’il
ait à rétablir. L’histoire requiert sa collaboration pour se bien dessiner. »
De plus il va volontairement choisir d’interrompre l’histoire, le narrateur n’est
plus un simple conteur de l’histoire, il est totalement actif et donne son avis
sur les actions des personnages : « J’aurais était curieux de savoir
ce qu’Antoine a pu raconter à son amie la cuisinière ; mais on ne peut pas
écouter. » (P32), il est aussi un ‘’personnage’’ de l’histoire qui donne
vie au récit, il donne au lecteur le sentiment de regarder les moindres fait et
gestes des personnages de très près. Finalement Gide en créant cette profusion
de personnage donne vie à son roman et apporte de la nouveauté dans le genre
romanesque, il brise toutes les règles traditionnelles et invente son univers
et sa propre conception esthétique. Il va alors se détacher de l’image du roman
réaliste. Il veut faire un roman libre, il ne s’impose pas de loi ni de
structure. En effet il faut pour cela le choix délibéré d’un style impersonnel :
« Tout doit être dit de la manière la plus plate, celle qui fera dire à
certains jongleurs : que trouvez-vous à admirer la dedans ? » (P81
JFM). Gide en plus d’avoir une multitude de personnage refuse de les décrire :
« Le mauvais romancier construit ses personnages, il les dirige et les
faits parler. Le vrai romancier les écoutent et les laissent agir ; »
(P85 JFM). A partir de là il est intéressant de constater que Gide laisse aller
ses personnages mais surtout qu’à travers cette démarche il donne la
possibilité au lecteur de les imaginer et de s’approprié un peu plus l’histoire.
La lecture du livre n’est plus passive, le lecteur est attentif, il participe.
Dans un second temps, la profusion des
personnages permet de faire avancer l’histoire
et de crée une intrigue au sein du roman. On constate que Gide va contre toute
forme d’intrigue unitaire, la profusion des personnages permet de ne pas rester
figer dans un même type d’histoire et surtout d’éviter au roman d’être
catégoriser dans un genre bien précis. Grâce à la multiplicité de ses
personnages le roman se rattache à plusieurs genres. Les personnages ont chacun
leurs caractères, leurs choix et leurs vécus ce qui fait que le roman se
dépeint en de nombreuses facettes. Il
est à la fois un roman policier avec l’affaire des fausses pièces de monnaies
que tente de régler Profitendieu et Molinier, mais aussi un roman d’aventures
avec les innombrables intrigues amoureuses qui règne dans le roman tel que
Vincent/Laura, Olivier/Bernard, Olivier/Edouard, Edouard/Laura, Lady Griffith/Vincent
et bien d’autre encore. On peut aussi parler d’aventures avec la découverte de
la sexualité et des désirs qui tendent vers l’homosexualité. On peut qualifier
l’œuvre de Gide comme étant un roman noir avec la présence de la figure du
diable (Passavant, Strouvilhou) qui va tenter les plus jeunes et les plus
faibles. Mais aussi avec les évènements
tragiques tels que le suicide de Boris. Enfin on peut parler d’un roman d’apprentissage
puisque le parcours de Bernard et Olivier qui est suivi par le lecteur tout au long
de l’œuvre montre l’affirmation des jeunes garçons et leur construction mentale
face aux différentes épreuves qu’ils rencontrent. Par la profusion des
personnages Gide va donc pouvoir donner du caractère à son roman. Gide va
justement imposer des pauses au niveau de la narration : « La
respiration est nécessaire entre les chapitres (mais il faudrait l’obtenir
aussi du lecteur)» (p84 JFM) il y a là une volonté de ne pas être emprisonner
dans une seule et même histoire, qui lasserait l’opportunité au lecteur de se
lasser. De plus entre le basculement d’une vie à une autre les personnages ont
un temps pour agir. La profusion
des personnages permet donc une avancé de l’histoire car à travers chaque
personnages on obtient des informations sur la vie des autres. En effet aussi
nombreux qu’ils soient les personnages sont tous relier entre eux. Par exemple
lorsque l’on découvre la relation entre Vincent et Laura, c’est par la voix de
plusieurs personnages qu’on la découvre, d’abord Olivier, ensuite Lady Griffith
et enfin avec le journal d’Edouard.
Pour conclure, Gide en s’opposant à toutes les
formes classiques du roman va créer une œuvre aux multiples facettes. Par la
profusion des personnages il construit son roman et en fait une grande
innovation pour le genre littéraire. A partir de celle-ci les personnages vont
chacun contribuer à l’avancer de l’histoire et à la participation du lecteur.
Cette profusion permet donc de bâtir l’œuvre.
CHUPIN Maëlys
C'est une analyse très pertinente. Bravo !
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