Les personnages
Mainte sont les procédés utilisés par Gide dans son roman novateur les faux monnayeurs. La profusion de personnage que nous offre le livre en est un des plus importants. L'auteur joue avec ce procédé afin de donner des points de vue divers à ses multiples intrigues. L'aspect physiques de ses personnages est absents de
leurs portraits et l'auteur choisit de nous livrer leur passé par de fines informations très peu précises.
Qu’apporte cette profusion de personnages au roman et quelle
justification André Gide en donne t’il dans son roman ?
Lorsque l’auteur évoque la vie de ses personnages, Gide
semble parler d'êtres vivants : il indique ainsi que ses personnages se sont
imposés à lui et qu'ils vivent à se dépens. Cette image peut traduire l'idée
que la vie du romancier nourrit l'imagination qui elle-même produit les personnages
du roman. Gide devient en quelque sorte un peu de chacun de ses personnages et
oublierait sa propre personnalité pour s'incarner tour à tour en chacun
d'eux. Laura, Bernard, Edouard, Lilian seraient ainsi des parties de lui et
grandiraient en lui comme pour l'envahir progressivement.
Les personnages sont souvent présentés par les écrivains comme
des êtres autonomes et dotés de réactions. Ils sont à la fois doubles de lui-même et rebuts
de lui, ils représentent des compagnons d'existence et beaucoup d'écrivains
avouent entendre leurs personnages leur parler ou sentir leur présence à leurs
côtés quand ils écrivent.
Gide se sert de ses personnages pour exposer une grande
partie de ses idées personnelles mais il n'endosse pas les revirements de ses
personnages et ne prend ainsi pas à son compte leurs évolutions successives.
Cette faculté de « dépersonnalisation » qu'il évoque à plusieurs
reprises dans son Journal pourrait être assimilée à l'inaptitude à s'exprimer
en son nom propre. « Il m'est certainement plus aisé de faire parler un
personnage, que de m'exprimer en mon nom propre; et ceci d'autant que le
personnage créé diffère de moi davantage... »
Les personnages de Gide sont notamment des voix qui savent
se faire entendre.
Ce sont des êtres de papier qui néanmoins se caractérisent
essentiellement par leurs voix que ce soit par la narration, les dialogues ou encore par des conversations
rapportées de plusieurs points de vue. Chaque personnage va s'efforcer d'avoir
une voix bien à lui, un style qui le distingue des autres. Gide prétend savoir
à la fois " comment ils pensent, comment ils parlent. Je distingue la
plus subtile intonation de leur voix " écrit-il dans son Journal. (p 58). Le personnage portant toutes ces caractéristique est le personnage de Bernard qui joue le rôle de script, de narrateur et de personnage. Par exemple dans le premier chapitre de roman il est script d'une lettre dédiée a son père ou encore lorsqu'il prend la possession du journal d'Edouard c'est a travers son point de vue que le lecteur découvrira les pensées intime du personnage.
En revanche, l’auteur ne voit pas leurs visages, leurs traits. Il tente de saisir l'inflexion de leur voix, leur ton et c'est selon sa
conception du roman, leur discours qui va donner accès à leur état d'âme. Roman
du flux de paroles, les personnages sont d'incorrigibles bavards et passent
leur temps à discuter les uns avec les autres ou à lire les lettres qu'ils
reçoivent.
Le lecteur peut
parfois être étourdi par cette profusion de voix et de personnages.
" Pour moi, explique Gide, c'est plutôt le langage que le geste
qui renseigne." Et il ajoute "le mauvais romancier construit ses
personnages ; il les dirige et les fait parler. Le vrai romancier les écoute et
les regarde agir ; il les entend parler dès avant que de les connaître et c'est
d'après ce qu'il les entend dire qu'il comprend peu à peu qui il
sont." Gide bâtit donc ses personnages à partir d'une forme verbale
préexistante.
Les personnages de Gide occupent différents rôles, ils
peuvent passer du premier plan au second plan en un simple chapitre. Ils
forment notamment des couples et des doublons ce qui permet de plus facilement
les distinguer.
Les personnages de Gide sont donc au centre du roman puis passent au second plan en un claquement de doigt. Gide s'amuse a travers ses chapitres a faire apparaitre et disparaitre ses personnages. Dans la première partie du roman une brisure temporelle causée par la lecture du roman d'Edouard par Bernard nous fera oublier les personnages du chapitre précédent. Ils seront donc oubliés par le lecteur et reprendront une place dans le roman à la fin de la lecture de Bernard. Les personnages de Bernard, Edouard ou encore Passavant ne possède aucune description physique tandis que des personnages insignifiant a l'intrigue du roman auront une description détaillé de leur apparence.
Même si dans l'absolu, Gide aimerait que chacun de ses
personnages soit "orphelin, fils unique, célibataire et sans enfant" il
s'efforce de créer des regroupements entre les différents acteurs de son récit.
Le premier principe de regroupement, ce sont les lien familiaux qui permettent
de regrouper les personnages par groupes. Ainsi on
distingue les Molinier et l'oncle Edouard, les Profitendieu, et les
Vedel-Azaïs. Nous retrouvons notamment des duos comme celui de Passavant et Lilian qualifié de duo diabolique.
Chaque élément de ces couples va ensuite former un nouveau
couple avec un personnage associé : Laura avec Vincent, le frère d'Olivier et
ensuite avec Bernard. Ou encore Edouard avec Olivier et ensuite avec Bernard. Certains personnages comme Guéridanisol et Strouvilhou n'interviennent que pour séduire ou détourner un
personnage d'un avenir plus ou moins tracé. Guéridanisol va influencer la confrérie de Georges afin de causer la mort du petit Boris et Strouvilhou lui va manipuler le même groupe d'enfant afin qu'ils assurent son trafic de fausses monnaies. Ces deux personnages sont les seuls pouvant prétendre au statut du diable en personne.
Pour conclure, la profusion de personnages que nous offre Gide
dans son roman nous permet de découvrir plusieurs visions de l’intrigue. Les personnages
sont des voix qui raconte ce qui se passe autour d’eux, ils sont le fil
conducteur de l’intrigue gidienne. Cette profusion permet notamment a l’auteur
de s’exprimer a travers eux et de passer un message sans pour autant s'exprimer en son propre
nom.
Une analyse intéressante (personnages doublons, etc), mais l'ensemble manque de rigueur et de construction. On ne voit pas assez clairement quels sont vos axes et quel est le lien entre chaque partie. Appuyez-vous davantage sur des exemples précis du roman et du JFM. Poursuivez ainsi !
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